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FICHE PRATIQUE : Télétravail

20 janvier 2020 | Derriennic Associés|

  • Comment mettre en place le télétravail ?

Il est préférable de prévoir les modalités de mise en place et d’exercice du télétravail dans le cadre d’un accord collectif ou, à défaut, d’une charte élaborée par l’employeur après avis du comité social et économique, s’il existe.

Toutefois, en l’absence de charte ou d’accord collectif, il est toujours possible de formaliser par tout moyen l’accord de recourir au télétravail (contrat de travail ou avenant, échanges d’emails, sms,…)

L’avantage de l’accord collectif est d’éviter d’avoir à gérer en urgence ou au cas par cas le recours au télétravail et d’assurer une égalité de traitement entre les salariés.

En outre, l’intérêt de privilégier un accord collectif est qu’il prédomine sur les dispositions de l’ANI du 19 juillet 2005, lesquelles s’imposeront en revanche à l’employeur si  le télétravail est mis en place  par une chartre ou par tout autre moyen.

  • Que doit prévoir la charte ou accord collectif ?

L’accord collectif mettant en place le télétravail ou, à défaut, la charte élaborée par l’employeur doit préciser (C. trav., art. L. 1222-9, II) :

  • les conditions de passage en télétravail et les conditions de retour à une exécution du contrat de travail sans télétravail ;
  • les modalités d’acceptation par le salarié des conditions de mise en œuvre du télétravail ;
  • les modalités de contrôle du temps de travail ou de régulation de la charge de travail ;
  • la détermination des plages horaires au cours desquelles l’employeur peut habituellement contacter le salarié en télétravail ;
  • les modalités d’accès des travailleurs handicapés à une organisation en télétravail.

Il est conseillé de déterminer précisément dans l’accord ou la charte les emplois ou catégories d’emplois pouvant bénéficier du télétravail et, inversement, exposer les raisons objectives qui excluraient certains postes, et le cas échéant une condition d’ancienneté.

Il est également préférable de fixer les modalités de mises en œuvre du télétravail : déterminer la procédure de demande de passage en télétravail, les modalités de prise en charge des frais induits par le télétravail, les  garanties pour assurer un retour dans l’entreprise lorsqu’il est mis fin au télétravail, …

  • Quelles précautions à prendre en l’absence d’accord collectif ou de chatre ?

En l’absence d’accord collectif ou de charte, le télétravail peut être mis en place « par tout moyen » : par une disposition du contrat de travail ou par un avenant à celui-ci, mais aussi par simples échanges d’emails entre l’employeur et le salarié.

Ce formalisme allégé ne soit pas, selon nous, exclure la fixation par écrit des modalités précises de mise en œuvre et d’exercice du télétravail (journées de télétravail, à défaut délai de prévenance, éventuellement prévoir une durée de test, etc…)

Cette possibilité n’est pas réservée au télétravail occasionnel, et peut être envisagée pour le télétravail régulier.

En outre, dans les en cas de circonstances exceptionnelles, telles que la menace d’épidémie ou la force majeure, la mise en œuvre du télétravail peut être considérée comme un aménagement du poste de travail rendu nécessaire pour permettre la continuité de l’activité de l’entreprise et garantir la protection des salariés (C. trav., art. L. 1222-11).

  • A qui s’adresse le télétravail ?

Le passage en télétravail repose uniquement sur le volontariat. Il en résulte qu’un salarié ne peut y être contraint, que ce soit sur le fondement d’un accord de performance collective ou sur la prescription d’un médecin du travail.

Le refus du salarié de passer au télétravail ne peut être en soi un motif de sanction ou de rupture du contrat de travail.

En outre, le télétravail implique que l’activité professionnelle puisse être exercée à distance dans de bonnes conditions. Il ne s’adresse qu’aux salariés pour lesquels leur activité s’y prête et qui détiennent des aptitudes individuelles et des qualités professionnelles de nature à permettre une parfaite maîtrise des systèmes informatiques et de remplir leurs fonctions de manière autonome.

Un délai de réflexion peut s’avérer nécessaire afin d’étudier la demande et de mettre éventuellement en place un système d’évaluation pour mesurer les capacités d’un candidat à passer en télétravail.

  • Quels frais et obligations pour l’employeur ?

Bien que l’ordonnance n°2017-1387 a supprimé l’obligation pour l’employeur de prendre en charge tous les coûts découlant directement de l’exercice du télétravail, la suppression de cette obligation ne signifie pas que l’employeur soit dispensé de toute prise en charge des frais induits par le télétravail, eu égard notamment à l’obligation qui pèse sur l’employeur de supporter les frais professionnels (Cass. soc., 19 sept. 2013, no 12-15.137).

Cette obligation ressort toujours de l’ANI du 19 juillet 2005, lequel prévoit que lorsque le télétravail s’exerce au domicile du salarié, sous réserve de la conformité des installations électriques et du lieu de travail, l’employeur fournit, installe et entretient les équipements nécessaires au télétravail. Si exceptionnellement l’employeur utilise son propre matériel, l’ANI prévoit que l’employeur en assurera l’adaptation et l’entretien.

Il est également recommandé à l’employeur de vérifier que l’assurance collective de l’entreprise cible le télétravail des salariés ainsi que les équipements mis à leur disposition, ou, à défaut de s’assurer que l’assurance habitation du salarié couvre l’espace de son logement dédié au télétravail ainsi que les matériels et équipements mis à sa disposition.

Le salarié peut également solliciter une indemnité d’occupation destinée à indemniser les frais engendréspar l’occupation de son domicile à titre professionnel (Cass. soc., 7 avr. 2010, no 08-44.865), même s’il bénéficie, au titre d’une clause contractuelle, d’une allocation forfaitaire pour frais professionnels (Cass. soc., 27 mars 2019, no 17-21.014).

  • Quel contrôle du temps de travail et de l’activité du salarié ? 
  • Contrôle de la durée et de la charge de travail du salarié

Le salarié en télétravail est couvert par la législation du travail et notamment par les règles applicables à la durée du travail. L’employeur doit donc veiller au respect des durées maximales de travail et des temps de repos. Il est tenu par son obligation de sécurité et doit s’assurer de la protection de la santé du salarié dans le cadre de la mise en œuvre du télétravail.

Lorsque le télétravail est mis en œuvre par Accord collectif ou par une Charte, ceux-ci doivent nécessairement prévoir : les modalités de contrôle du temps de travail du télétravailleur, de régulation de la charge de travail du salarié, les plages horaires durant lesquelles l’employeur peut contacter le salarié en télétravail.

La problématique particulière des salariés en télétravail  doit être prise en considération, avec  le blocage de l’accès au réseau de l’entreprise au-delà de certaines heures, le week-end, et le respect impératif des plages horaires définies avec le salarié durant lesquelles il  peut être contacté, etc.

Par ailleurs, l’employeur est tenu d’organiser, chaque année, un entretien avec le salarié en télétravail portant sur ses conditions d’activité et sa charge de travail (C. trav., art. L. 1222-10). Cet entretien peut être l’occasion d’aborder les éventuelles difficultés que rencontre le salarié en matière de gestion de son temps de travail. La séparation entre vie personnelle et vie professionnelle peut en effet être rendue plus délicate du fait du travail réalisé au domicile.

  • Contrôle au domicile du salarié

L’article 8 de l’accord interprofessionnel du 19 juillet 2005 reconnaît ce droit d’accès à l’employeur, aux autorités administratives et aux représentants du personnel, compétents en la matière. Il précise toutefois que « si le télétravailleur exerce son activité à son domicile, cet accès est subordonné à une notification à l’intéressé qui doit préalablement donner son accord ».

Par ailleurs, le télétravailleur est autorisé « à demander une visite d’inspection ».

Lorsque le télétravail est formalisé par un avenant au contrat de travail, ce dernier peut également autoriser des visites du domicile du salarié pendant ses horaires de télétravail. Le refus de l’intéressé de s’y soumettre constitue une faute pouvant, selon nous, justifier son licenciement ou à tout le moins le retrait du bénéfice du télétravail.

Il est également envisageable de prévoir une visite domiciliaire sur rendez-vous, mais il est dans ce cas conseillé de préciser que c’est après accord préalable et écrit du télétravailleur, et en sa présence.Si l’on souhaite pouvoir sanctionner le refus injustifié du salarié sans toutefois le licencier, il est conseiller de compléter le règlement intérieur sur ce point.

  • Quelles garanties pour la protection des données de l’entreprise ?

Dans la mesure où le salarié en télétravail utilise les technologies de l’information et de la communication, il doit se conformer aux documents internes qui conditionnent leur usage et notamment la charte informatique. Dès lors, il convient de vérifier que le champ d’application est étendu au personnel travaillant à distance et, à défaut, le corriger.

Il conviendra de rappeler que le salarié en télétravail doit porter une attention toute particulière aux règles de sécurité et plus spécifiquement de rappeler que les codes et mots de passe sont strictement personnels et confidentiels et l’interdiction de laisser un tiers accéder à son matériel.