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La france, premier pays du monde à réglementer les levées de fonds en crypto-monnaie

12 novembre 2018 | Derriennic Associés |

Article 26 du projet de loi n°1088 relatif à la croissance et la transformation des entreprises.

Le 9 octobre dernier, l’Assemblée Nationale a adopté en première lecture l’article 26 du projet de loi PACTE, plaçant la France comme le leader mondial de la réglementation des levées de fonds en crypto-actifs.

Guidés par les résultats de la consultation publique lancée par l’Autorité des marchés financiers (AMF) à l’automne 2017, les parlementaires ont élaboré la toute première réglementation des offres au public de jetons, plus connues sous l’acronyme anglais ICO (initial coin offering), afin de protéger les acquéreurs de jetons et les porteurs de projets, majoritairement constitués de start-up.

L’article 26 définit le jeton comme « tout bien incorporel représentant, sous forme numérique, un ou plusieurs droits, pouvant être émis, inscrits, conservés ou transférés au moyen d’un dispositif d’enregistrement électronique partagé permettant d’identifier, directement ou indirectement, le propriétaire dudit bien. »

L’offre au public de jetons est quant à elle définie comme le fait de « proposer au public, sous quelque forme que ce soit, de souscrire à ces jetons. » Et les parlementaires de ne pas se contenter de cette définition puisqu’ils en fournissent son pendant par la négative, en vue de bien circonscrire le périmètre de ces nouveaux modes de levées de fonds. Ainsi, l’article 26 précise que « ne constitue pas une offre au public de jetons l’offre de jetons ouverte à la souscription par un nombre limité de personnes, fixé par le règlement général de l’Autorité des marchés financiers, agissant pour compte propre. »

Après avoir défini ces nouvelles notions juridiques, l’article 26 détermine la réglementation applicable à ce nouveau dispositif.

L’émetteur d’une offre au public de jetons (d’une levée de fonds numériques), devra obligatoirement être une personne morale de droit français, c’est-à-dire établie ou immatriculée en France.

Les acquéreurs de jetons devront être identifiés, le législateur interdisant l’anonymisation dans une logique de lutte conte le blanchement.

L’émetteur devra mettre en place un mécanisme de séquestre des fonds récoltés afin d’éviter leur disparition.

Il établira également un livre blanc (« white paper ») destiné à fournir les informations utiles au public, c’est-à-dire aux potentiels acquéreurs. Ces informations porteront a minima sur le projet lié à la levée de fonds numériques et son évolution, les droits conférés par les jetons, et le traitement comptable des fonds levés.

Par ailleurs, l’article 26 confère un rôle à l’Autorité des marchés financiers, laquelle pourra délivrer son visa aux levées de fonds qui respecteront les conditions susvisées, offrant ainsi les garanties minimales aux acquéreurs.

S’il peut paraître regrettable que ce visa ne soit qu’optionnel, il incitera néanmoins les acquéreurs à participer aux levées de fonds « sûres » pour lesquelles l’AMF aura certifié le caractère sérieux.

L’AMF disposera également d’un pouvoir de sanction administrative puisqu’elle pourra communiquer publiquement sur le retrait de son visa dans le cas où un émetteur se prévaudrait à tort de la délivrance d’un visa de l’AMF, ou si un émetteur continuait à se prévaloir d’un visa qu’elle lui aurait retiré.

Genèse de la réglementation des levées de fonds crypto-actifs, l’article 26 du projet de loi PACTE fournit un cadre juridique souple à ce nouveau type de levée de fonds, lequel aura vocation à être adapté en fonction des évolutions technologiques et économiques, afin de développer un écosystème cohérent, durable et adaptable à ces nouveaux instruments financiers. Mais avant de songer à de potentielles évolutions, il convient encore d’attendre son examen par le Sénat en janvier 2019.