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La rémunération de directeurs de collection ne constitue pas forcément une rémunération au titre du droit d’auteur

13 janvier 2020 | Derriennic Associés |

Cass. 2ème civ., 10 octobre 2019, n°18-17.877 

Si l’auteur est rarement défini en droit positif, de nombreux textes le concernent pourtant, qu’il s’agisse du Code de la propriété intellectuelle, du Code du travail, du Code général des impôts, ou du Code de la sécurité sociale.

Le régime des auteurs étant plus intéressant, de nombreuses rémunérations sont ainsi déclarées de préférence en droits d’auteur, plutôt que comme salaires. Cependant, l’Urssaf, comme les juges du fond, sont vigilants et ces derniers requalifient souvent des droits d’auteur en salaire.

En l’espèce, une société d’édition a fait l’objet d’un contrôle par l’URSSAF, ayant donné lieu à redressement des rémunérations perçues par les Directeurs de collection, lesquelles avaient été assujetties à tort aux cotisations du régime social des auteurs. L’URSSAF considère au contraire que ces rémunérations sont des salaires et que les deux directeurs de collection doivent être affiliés au régime général.

La Cour d’appel rejette l’appel formé par l’URSSAF du jugement rendu par le Tribunal des affaires de sécurité sociale annulant le redressement, considérant que la rémunération de directeurs de collection devait s’analyser en droit d’auteur soumis à cotisations auprès du régime spécifique de l’AGESSA (organisme en charge de la gestion du régime de Sécurité sociale des artistes auteurs).

En effet, l’arrêt a retenu que les directeurs de collection, de par leur fonction :

  • faisaient œuvre de création : choix des photos figurant en couverture des ouvrages, rédaction des 4èmes de couverture, écriture de préfaces, révision des traductions, etc. ;
  • étaient rémunérés par un pourcentage sur les ventes ;
  • n’étaient pas en situation de subordination avec la société (ils organisaient librement leur travail et effectuaient les tâches le soir, le weekend, parfois à leur domicile, et n’étaient soumis à aucun horaire de travail) ;
  • l’existence d’une clause de non-concurrence ne permet pas de rapporter la preuve de l’existence d’une relation salariale, car circonscrite à la direction d’une collection concurrente pour un éditeur concurrent ;

La Cour considère donc que les directeurs de collection ont la qualité de co-auteur, en ce qu’ils ont concouru à créer une œuvre, et leur rémunération doit s’analyser en un droit d’auteur soumis à cotisations auprès du régime spécifique des auteurs géré par l’AGESSA, tout en confirmant le jugement du TASS, qui avait pourtant jugé que ceux-ci n’avaient pas la qualité d’auteur.

L’affaire est donc portée devant la Cour de cassation, qui censure ledit arrêt au visa de l’article 455 du Code de procédure civile : « en statuant ainsi, la cour d’appel a entaché sa décision d’une contradiction entre les motifs et le dispositif et violé le texte susvisé » et au visa des articles 14 du Code de procédure civile et L. 311-2 du Code de la sécurité sociale au motif suivant : « en statuant ainsi, sans que soient appelés dans la cause les directeurs de collection, alors qu’elle était saisie d’un litige portant sur la qualification des relations de travail liant ces derniers à la société, la cour d’appel a violé les textes susvisés ».

La Haute juridiction a considéré que les juges d’appel, en se bornant à affirmer que la rémunération de deux directeurs de collection doit s’analyser en un droit d’auteur soumis à cotisations auprès du régime spécifique des auteurs de l’AGESSA sans en justifier, ont procédé par voie de simple affirmation.

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