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Le pv de réception signé pour le seul besoin de la location financière doit être écarté

14 janvier 2020 | Derriennic Associés |

Tribunal de commerce de Lyon du 28 octobre 2019

Le Tribunal de commerce de Lyon est revenu sur la signature d’un PV de réception signé pour les seuls besoins de la location financière et ne représentant aucune livraison effective des prestations.

Un client s’est plaint du caractère inexploitable du site internet développé par son prestataire, la société Serco et en a demandé la résolution. Il avait fait financer ce développement par un contrat d’abonnement, formant une opération de location financière.

Le contrat de location prévoyait donc 220 € par mois sur 60 mois, le point de départ étant la date de mise à disposition de la première page internet. Le prestataire va développer également des outils de gestion du site et mettre en ligne le site sur son adresse définitive, et enfin former les personnes en charge de sa gestion. Le client valide bien les maquettes du site et le prestataire intègre les pages en se basant dessus pour ensuite les mettre en ligne.

Le Tribunal constate que les promesses écrites dans l’offre de prix pour un site marchand n’ont pas été tenues. Il rappelle qu’il n’existait aucun cahier des charges écrit qui aurait permis de préciser à la fois les développements techniques demandés et acceptés et les délais de réalisation.

Les maquettes du site ont certes été fournies par la société Serco et validées par le client, mais les échanges par mail postérieurs font état d’une absence constante de concertation sur le développement du site et mettent en évidence tout le préjudice de l’absence d’un cahier des charges écrit. Par-là, le Tribunal vise :

  • la surprise du prestataire face à l’ampleur de la base de données,
  • l’absence de solution sécurisée pour transmettre cette base de données,
  • le délai de réalisation de 10 mois après la signature du bon de commande pour aboutir à la fourniture d’un site internet qui ne satisfait pas du tout le client.

Le Tribunal relève qu’il est constant que la méthode utilisée par la société Serco, pourtant sachante et professionnelle en la matière, est à l’origine des difficultés rencontrées. Cela allait jusqu’à l’absence de recette préalable par la société Serco qui fournit à son client un produit présentant de très nombreux dysfonctionnements.

Les nombreuses difficultés entraînées sont répertoriées par la juridiction :

  • commandes de produit hors stock,
  • absence de mail de confirmation de commande,
  • factures non conformes,
  • système 3D Secure non fonctionnel,
  • erreur dans la TVA,
  • erreurs dans les liens de contact,
  • erreur dans le lien de paiement sécurisé,
  • erreur dans le plan d’accès etc.

En conséquence, le Tribunal juge recevable l’action du client en résolution du contrat le liant à la société Serco. Cette dernière n’a pas été en mesure de fournir à son client un site internet correspondant aux attentes de celui-ci. Les dysfonctionnements importants encore constatés au mois de décembre 2017, soit plus 10 mois après la signature du bon de commande sont incompatibles avec une exploitation commerciale du nouveau site internet. La société Serco, en particulier par l’approximation de sa méthode de travail, n’a pas respecté ses engagements.

Sur le contrat de location financière avec Locam

Le Tribunal juge que la signature du procès-verbal de livraison le 26 avril 2017 est injustifiée car ne correspond pas dans les faits à la date de livraison du site internet commandé. Le tribunal retient donc que « ce procès-verbal de livraison n’a été qu’un prétexte à la mise en route de la facturation mensuelle des frais de location et au paiement du prix de la prestation complète à la société Serco par la société Locam ».

La société Serco en était nécessairement consciente et elle a agi envers [le client] de manière dolosive au sens de l’article 1137 du Code civil. En conséquence le Tribunal juge que ce procès-verbal de livraison caractérise une action dolosive de la société Serco à l’encontre [du client] et qu’il ne pourra donc pas être pris en compte dans la relation contractuelle entre le client et le prestataire d’une part et d’autre part dans la relation contractuelle entre le client et la société Locam.

Sur les préjudices, le Tribunal alloue une réparation pour perte de chiffre d’affaires en se fondant sur le chiffre d’affaires moyen des mois de septembre et d’octobre sur 3 ans, qui s’élevait à 44.691 € HT alors qu’il a été de 17.724 € HT sur la même période en 2017. Il était donc juste, à suivre le Tribunal, de considérer que la perte de chiffre d’affaires enregistrée en 2017 correspond à la différence, c’est-à-dire 26.967 € HT.

Le taux de marge de 43,6% indiqué par le client a été retenu par le Tribunal, sans plus d’explication, estimant qu’il est cohérent avec l’activité pratiquée. La perte de marge brute enregistrée sur la période est donc de 11.757 € HT.

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