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Le retard, manquement d’une gravité suffisante pour obtenir la résolution d’un contrat d’intégration

20 avril 2017 | Derriennic Associés|

 

Cour d’appel de Paris, Pôle 5, Chambre 11, Arrêt du 10 mars 2017, Répertoire général nº 15/03970

Même lorsque le prestataire a souscrit à une obligation de moyens, les retards dans la livraison constituent des manquements d’une gravité suffisante, pour que la résolution du contrat d’intégration soit prononcée par le juge, entrainant celle du contrat d’assistance en application du principe d’indivisibilité et la restitution des sommes versées par le client. Cependant la résolution du contrat ne fait pas échec à l’application de la clause limitative de responsabilité aux seuls dommages directs.

Une société signe en mars 2011 un contrat d’intégration d’une solution progicielle ERP et un contrat de service et d’assistance. L’intégrateur devait adapter aux besoins du client la solution progicielle proposée en standard et des délais contractuels définitifs sont validés. La recette provisoire ne pouvant être prononcée du fait de nombreuses anomalies et le client insatisfait assigne l’intégrateur en résolution du contrat dès mai 2012.

L’intégrateur soutient que les griefs qualifiés d’anomalies sont en réalité des défauts d’utilisation, que les dysfonctionnements auraient pu être corrigés et que c’est l’absence de collaboration et attitude contentieuse du client qui est à l’origine de la mauvaise gestion et l’échec du projet.

Alors que le tribunal de commerce de Paris avait prononcé la résiliation des deux contrats aux torts du client, le condamnant à régler les factures impayées, la Cour d’appel va, sur le fondement de l’article 1184 du code civil, faire droit à ses demandes, peu important que l’obligation qui pesait sur l’intégrateur soit une obligation de moyens.

Pour les juges, l’intégrateur n’établit pas que les retards intervenus seraient dus à un manque de collaboration du client qui aurait rendu impossible l’intégration. C’est bien à l’intégrateur « professionnel de l’informatique » qu’il appartenait de délivrer les conseils et l’assistance nécessaires et de s’adapter à son client non professionnel en le suppléant en cas de défaillance ou d’incompétence.

L’intégrateur a gravement manqué à ses obligations contractuelles – les délais constituant une obligation déterminante – et la résolution du contrat d’intégration est prononcée entrainant du fait de leur interdépendance, celle du contrat de de services d’assistance, ce dernier « n’ayant de sens que si le contrat de livraison du progiciel a été exécuté ». Le client se verra donc rembourser les sommes versées.

Les juges font application, malgré la résolution, de la clause limitative de responsabilité du contrat : la responsabilité de l’intégrateur était limitée aux seuls dommages directs, conséquence immédiate de l’inexécution du contrat, ce qui exclut notamment les dépenses de personnel interne.

Le client ne peut établir l’existence d’un préjudice en lien direct avec les manquements du prestataire, l’utilisation de son personnel ne constituant pas une dépense supplémentaire et la Cour rejettera sa demande de dommages et intérêts.