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Survie de la clause limitative de responsabilité en cas de résolution du contrat

09 avril 2018 | Derriennic Associés|

 

Cour de cassation, Chambre commerciale, Arrêt nº 181 du 7 février 2018, Pourvoi nº 16-20.352

Par un attendu de principe, la Cour de cassation opère un revirement de jurisprudence, affirmant que les clauses limitatives de réparation demeurent applicables en cas de résolution du contrat pour inexécution. Un arrêt sans doute à interpréter en regard du nouvel article 1230 du code civil, même s’il est rendu sous le visa des anciens articles 1134 et 1184

Une société procède à des réparations sur une chaudière d’une centrale. Après la survenance de nouvelles fuites, une expertise judiciaire a conclu qu’elles étaient imputables au prestataire. Le client assigne en résolution du contrat, restitution et paiement de dommages-intérêts en réparation de ses préjudices matériels et de ses pertes d’exploitation. Le prestataire demande l’application de la clause limitative de réparation.

La Cour d’appel de Nancy, le 20 avril 2016, condamne le prestataire au paiement de dommages-intérêts, en retenant que la résolution de la vente emportant anéantissement rétroactif du contrat et remise des choses en leur état antérieur, il n’y a pas lieu d’appliquer la clause limitative de responsabilité.

Le prestataire forme un pourvoi, au moyen invoqué que lorsqu’une inexécution contractuelle entraîne la résolution judiciaire du contrat, la réparation du préjudice causé par cette inexécution reste soumise à la clause limitative de responsabilité stipulée dans le contrat, laquelle vise par nature à régler les conséquences de cette inexécution, nonobstant l’anéantissement rétroactif du contrat ; en lui déniant le droit de se prévaloir de la clause limitative de responsabilité stipulée dans le contrat (qui notamment plafonnait la responsabilité à 100% du prix HT), en raison de la résolution de ce contrat, tandis que cette résolution était sans incidence sur l’applicabilité de la clause, la cour d’appel aurait violé les articles 1134 et 1184 du code civil dans leur rédaction antérieure à l’ordonnance du 10 février 2016.

La cour de cassation censure les juges du fonds : « en statuant ainsi, alors qu’en cas de résolution d’un contrat pour inexécution, les clauses limitatives de réparation des conséquences de cette inexécution demeurent applicables, la cour d’appel a violé les textes susvisés ».

Les parties sont renvoyées devant la Cour d’appel de Colmar.

Rappelons que la même chambre de la Cour de cassation avait précédemment rendu les arrêts contraires suivants :

  • « la résolution de la vente emportant anéantissement rétroactif du contrat et remise des choses en leur état antérieur, la cour d’appel en a exactement déduit qu’il n’y avait pas lieu d’appliquer les clauses limitatives de responsabilité. » (Cass. Com., 5 oct 2010, n° 08-11.630)
  • « qu’ayant retenu que la gravité des manquements (…) justifiait la résolution du contrat aux torts exclusifs de cette dernière, en application des dispositions de l’article 1184 du Code civil, la cour d’appel en a déduit à bon droit que le contrat résolu étant anéanti, la société n’était pas fondée à se prévaloir des stipulations contractuelles régissant les conditions et les conséquences de sa résiliation unilatérale (…) » (Cass. com., 3 mai 2012, n° 11-17.779)

Jurisprudence régulièrement appliquée par les juges du fond, comme l’avait fait la Cour de Nancy .

Citons récemment « La résolution des contrats entraîne la condamnation de la société X à rembourser à la société Y les sommes perçues en exécution des contrats, sans qu’une clause de limitation de responsabilité puisse être appliquée, dès lors que la résolution emporte anéantissent rétroactif des contrats.” (Cour d’appel de Lyon, 23 novembre 2017, nº 16/05155)

Depuis la réforme du droit des contrats, l’article 1230 du Code civil prévoit que « la résolution n’affecte ni les clauses relatives au règlement des différends, ni celles destinées à produire effet même en cas de résolution, telles les clauses de confidentialité et de non-concurrence. » La clause venant limiter la réparation entre dans ce cadre, visant, par nature, à régler les conséquences de la fin du contrat pour manquement. Rendue relativement à la réparation due, la solution semble évidemment transposable aux clauses limitatives de responsabilité, plus larges que la simple détermination du montant.