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Un consentement univoque à l’utilisation des cookies

04 novembre 2019 | Derriennic Associés|

L’organisation d’un jeu promotionnel par la société Planet49 a poussé le Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice, Allemagne) à poser plusieurs questions préjudicielles à la CJUE afin de clarifier les conditions de recueil du consentement à l’utilisation de cookies.

La société Planet49 avait organisé, sur son site internet, un jeu promotionnel. Sur la page de soumission de la participation, étaient présentes deux mentions accompagnées d’une case à cocher.

La première mention, dont la case n’était pas cochée par défaut, se lisait comme suit :

« J’accepte que des sponsors et partenaires m’informent par voie postale, par téléphone, par courrier électronique ou par message SMS de promotions dans leur domaine d’activité respectif. Je peux les déterminer ici moi-même faute de quoi l’organisateur les sélectionnera. Je peux revenir à tout moment sur mon acceptation. Pour plus d’informations à ce sujet, ici. »

La seconde mention, dont la case était cochée par défaut, se lisait comme suit :

« J’accepte que le service d’analyse du web Remintrex soit mis en œuvre chez moi. En conséquence, l’organisateur du jeu promotionnel, [Planet49], installera des cookies après avoir été agréé pour le jeu promotionnel, ce qui lui permettra d’exploiter par Remintrex mes navigations sur le web et mes visites sur les sites web des partenaires publicitaires et d’adresser de la publicité centrée sur mes intérêts. Je peux supprimer les cookies à tout moment. Lire les détails ici. »

Il convient de relever que la participation au jeu était conditionnée à l’acceptation, par l’internaute, de faire l’objet d’opérations de prospection commerciale, dans les conditions visées par la première mention.

Dans le cadre d’une mise en demeure qui est restée sans suite, la fédération des organisations et associations de consommateurs a soutenu que les déclarations d’accord sollicitées par Planet49 au moyen des première et seconde cases à cocher ne remplissaient pas les conditions requises par le droit national allemand applicable.

La fédération a introduit devant le Landgericht Frankfurt am Main (tribunal régional de Francfort-sur-le-Main) un recours tendant, en substance, à ce que Planet49 cesse de solliciter de telles déclarations d’accord et qu’elle soit condamnée à lui verser la somme de 214 euros, majorée d’intérêts depuis le 15 mars 2014. Cette juridiction a fait partiellement droit à ce recours.

À la suite d’un appel interjeté par Planet49 devant l’Oberlandesgericht Frankfurt am Main (tribunal régional supérieur de Francfort-sur-le-Main), cette juridiction a estimé que la demande de la fédération tendant à ce que Planet49 cesse d’inclure, dans des conventions de jeu promotionnel passées avec des consommateurs, la seconde mention, dont la seconde case à cocher était cochée par défaut, n’était pas fondée en ce que, d’une part, l’utilisateur avait connaissance de la possibilité de décocher cette case et, d’autre part, celle-ci était présentée dans une typographie suffisamment claire et donnait des informations sur les modalités d’utilisation des cookies, sans qu’il soit nécessaire de divulguer l’identité des tiers susceptibles d’avoir accès aux informations recueillies.

Le Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice), saisi par la fédération d’un recours en révision, a considéré que l’issue du litige au principal dépendait de l’interprétation des dispositions combinées de l’article 5, paragraphe 3, et de l’article 2, sous f), de la directive 2002/58, de l’article 2, sous h), de la directive 95/46 ainsi que de l’article 6, paragraphe 1, sous a), du règlement 2016/679.

Éprouvant des doutes sur la validité, au regard de ces dispositions, de l’obtention, par Planet49, du consentement des utilisateurs de son site internet au moyen de la seconde case à cocher ainsi que sur l’étendue de l’obligation d’information prévue à l’article 5, paragraphe 3, de la directive 2002/58, le Bundesgerichtshof a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

  1. Le consentement est-il valablement donné lorsque le stockage d’informations ou l’accès à des informations stockées dans l’équipement terminal de l’utilisateur est autorisé par une case cochée par défaut que l’utilisateur doit décocher pour refuser de donner son consentement ?
  2. Quelles sont les informations que le fournisseur de service doit donner à l’utilisateur au titre de l’information claire et complète ? La durée de de fonctionnement des cookies et l’accès ou non de tiers aux cookies en font-ils partie ?

S’agissant de la première question, la CJUE a indiqué que le consentement à l’utilisation des cookies doit, selon le considérant 32 du RGPD, être un « acte positif ». Une case pré cochée n’est donc pas suffisante pour recueillir le consentement, peu important d’ailleurs que des données à caractère personnel soient, ou non, traitées par le biais des cookies.

S’agissant de la seconde question, la CJUE a indiqué que la durée de fonctionnement et la liste des destinataires, ou les catégories de destinataires, devaient faire partie de l’information à fournir aux utilisateurs :

« L’information sur la durée de fonctionnement des cookies doit être considérée comme répondant à l’exigence d’un traitement loyal des données prévue par ledit article [article 10 de la directive 95/46], en ce que, dans une situation telle que celle en cause au principal, une durée longue, voire illimitée, implique la collecte de nombreuses informations sur les habitudes de navigation et la fréquence des visites éventuelles de l’utilisateur sur les sites des partenaires publicitaires de l’organisateur du jeu promotionnel. »

« Quant à la possibilité ou non pour des tiers d’avoir accès aux cookies, il s’agit d’une information comprise dans les informations mentionnées à l‘article 10, sous c), de la directive 95/46, ainsi qu’à l’article 13, paragraphe 1, sous e), du règlement 2016/679, dès lors que ces dispositions mentionnent explicitement les destinataires ou les catégories de destinataires des données. »

Lien vers la décision : http://curia.europa.eu/juris/document/document.jsf;jsessionid=B25E2F46B30685495E0DE31BD5E2B3F8?text=&docid=218462&pageIndex=0&doclang=fr&mode=lst&dir=&occ=first&part=1&cid=5228689