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Broadcom assignée en référé aux États-Unis par AT&T. Quels enseignements en tirer ? 

16 octobre 2024 | Erwan CARPENTIER-TOMASI|

Broadcom assignée en référé aux États-Unis par AT&T : quels enseignements en tirer ? 

AT&T a décidé de prendre la voie judiciaire pour contrer Broadcom dans sa stratégie de refonte des licences VMware. En tant que client utilisateur, que nous apporte cette assignation ?

Dans la bataille que mènent certains clients utilisateurs de licences VMware de virtualisation de serveurs face à la société Broadcom, qui, pour rappel, avait racheté la société VMware en novembre 2023 pour plus de 61 milliards de dollars, certains clients n’hésitent pas à aller devant les tribunaux.
C’est ce qu’a fait AT&T le 29 aout dernier en assignant Broadcom en référé devant la Cour Suprême de l’Etat de New York aux Etats Unis.

AT&T, fournisseur de solutions de télécommunications pour plus de 1 million de clients chacun jour, incluant des personnes physiques mais aussi des centaines de sociétés vitales aux Etats (sapeurs pompiers, établissements publics du renseignements, centre d’appel d’urgence, hôpitaux etc.) est extrêmement dépendante des solutions de virtualisation de machines VMware. Au sein de son assignation, AT&T précise qu’elle utilise plus de 8.000 serveurs qui, grâce aux technologies VMware, lui permettent d’obtenir plus de 75.000 machines virtuelles. 

Or, en dépit d’accords contractuels existants avec VMware puis avec la société repreneuse Broadcom au travers des EULA et de multiples avenants, cette dernière a décidé de manière unilatérale, comme avec tous les clients utilisateurs, d’imposer un passage aux licences à souscription avec des augmentations de redevances pouvant atteindre 1.200 % tout en informant (menaçant ?) que le support sur les anciennes licences perpétuelles allait être arrêté. Au titre de cette assignation, un des désaccords majeurs porte sur la possibilité contractuelle de renouveler le support sur les anciennes licences perpétuelles (« Pre installed software ») pour une année seulement (position d’AT&T) ou de renouvellement uniquement pour 3 ans (position de Broadcom).

C’est face à ce comportement où Broadcom a cherché à obtenir une fortune (« king’s ransom ») de la part  d’AT&T et en empêchant cette dernière de commander une année support seulement que AT&T a initié une action en référé (« injunctive relief ») pour dénoncer :

  • Les violations contractuelles de Broadcom (pour non-respect des termes de l’EULA et des ses avenants),
  • La survenance imminente d’un dommage irréparable

Que retenir de cette assignation :

  1. Ne pas oublier de vérifier votre clause d’ordre de priorité des documents en cas de conflit d’interprétation : De manière malicieuse AT&T relève que le droit à modification unilatérale de Broadcom puisait sa source au sein des Policies avec la fameuse End of Availibility et autres annexes ne peut pas venir annihiler un droit mentionné au contrat (Special Terms et au sein d’un avenant) qui permet à AT&T de commander le support,
  2. La preuve d’un préjudice imminent et irréparable se démontre par les conséquences que subirait AT&T et ses clients (centre d’appel d’urgence par exemple) en cas d’arrêt du support des licences virtuelles VMware. En l’espèce, il semble clair que faute de maintenance sur les anciennes licences VMware, AT&T pourrait faire face à de graves problèmes d’incidents de sécurité dans l’usage des machines virtuelles dont elle est ultra dépendante. De manière très forte, AT&T mentionne que cette désormais connue « End of Availibility » des produits et des services est une « farce » qui a été créée pour mettre à Broadcom de couvrir ses traces alors qu’elle « piétine » les droits de renouvellement d’AT&T en vertu de l’avenant.
  3. L’effet miroir : de manière encore une fois pertinente AT&T démontre dans son assignation que si Broadcom était forcée de respecter les termes du contrat et donc d’autoriser AT&T à commander le support pour les anciennes licences, Broadcom ne souffrirait d’aucun préjudice. Dans ce type d’assignation, le Tribunal doit peser les préjudices potentiels pour les deux parties et déterminer laquelle subirait le plus grand tort. 

Notre cabinet suivra avec attention les prochaines étapes de cette affaire américaine en perspective des initiatives individuelles de certains clients en France mais aussi des initiatives de groupe telles que celles du CISPE, ou la lettre ouverte du CIGREF avec trois autres associations d’utilisateurs de solutions digitales.

Pour en savoir plus sur cette problématique, contactez nos avocats spécialisés en informatique.