Dans un arrêt du 22 mars 2024, la Cour d’appel de Paris se saisit de l’occasion d’un litige entre deux sociétés concernant un projet informatique pour détailler son approche des méthodes de développement « Agile » ; c’est dans ce cadre qu’elle prononce la résiliation aux torts partagées des cocontractants.
En l’espèce, une société spécialisée dans le linge de maison avait conclu le 21 mai 2018 :
- Un contrat cadre pour la réalisation d’une plateforme web e-commerce avec un prestataire informatique.
- Un contrat d’exécution de ce contrat cadre avec ce même prestataire.
- Et un contrat d’utilisation de la solution en SaaS auprès d’un éditeur.
Des difficultés émergent dès le début de l’exécution du contrat, aboutissant à la paralysie du projet : lesquelles sont, pour le prestataire, imputables à un défaut de collaboration du client, conduisant le prestataire à résilier le contrat et à assigner le client en paiement devant le Tribunal de commerce de Paris.
L’éditeur de la solution Saas n’ayant pas été payé non plus assigne également le client et les affaires sont alors jointes.
Alors que le Tribunal de commerce de Paris déboute les demanderesses, ces dernières interjettent appel et la société client demande à nouveau, incidemment, l’annulation du contrat pour erreur sur les caractéristiques substantielles de la prestation et, en l’occurrence, les exigences de la méthode Agile qui n’auraient pas été suffisamment explicitées par le prestataire manquant ainsi son obligation de conseil.
Par un arrêt en date du 22 mars 2024, la Cour d’appel de Paris rejette les demandes du prestataire et du client, condamnant ce dernier au règlement des factures du fournisseur de la solution, qui obtient également une indemnisation pour le préjudice subi du fait de la caducité du contrat principal. Cette indemnisation doit être supportée par moitié par le client et le prestataire.
Une résiliation prononcée aux torts partagées, pour non-respect d’un accord intervenu entre les parties en cours d’exécution.
La Cour motive sa décision de rejet des demandes du client et du prestataire de la manière suivante :
- Le client a été suffisamment informé des exigences de la méthode Agile par le prestataire, à travers quatre présentations de la solution et une formation sur cette méthode, de nature à satisfaire à l’obligation de conseil du prestataire.
- La résiliation du contrat par le prestataire est estimée aux torts partagés des parties : en effet, bien que le prestataire formule de nombreux reproches à l’encontre du Client pour son manque de coopération selon la méthode Agile, ce dernier, qui avait accepté une reprise du projet sous condition de respect d’un échéancier de paiement par son client, a rompu l’accord intervenu entre les parties sur la poursuite du projet, en résiliant unilatéralement le contrat.
- La Cour estime enfin que le contrat conclu avec l’éditeur de la solution et le contrat de prestation sont interdépendants, la résiliation du second entraînant donc la caducité du premier.
Source : Cour d’appel de Paris, 22 mars 2024, n°21/07008