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Caméras intelligentes : position de la CNIL sur leur déploiement

07 septembre 2022 | Derriennic Associés|

Le 19 juillet 2022, la CNIL a publié sa position sur les conditions de déploiement des caméras dites « intelligentes » (ou augmentées) dans les espaces publics, précisant le régime juridique applicable à ces dispositifs et les risques associés.

Face à une « dynamique générale de déploiement » des dispositifs de caméras « intelligentes », la CNIL a estimé nécessaire de présenter « sa compréhension, ses réflexions et analyses sur le sujet d’un point de vue éthique, technique et juridique ». En publiant sa position, elle rappelle qu’il est nécessaire de définir un cadre juridique clair et les « lignes rouges » à ne pas franchir.

A titre liminaire, la CNIL rappelle la définition du terme de vidéo « intelligente », à savoir « les dispositifs vidéo auxquels sont associés des traitements algorithmiques mis en œuvre par des logiciels ».

Le marché, en croissance rapide, compte, selon l’autorité de contrôle, quatre usages principaux : « l’industrie, la défense, les smart cities et le commerce de détail ».

La CNIL donne en exemple des cas d’usage dans le secteur public (par exemple l’exercice de missions de police, la régulation de flux de circulation, la détection de bagages abandonnés ou encore la mesure de l’affluence et de la fréquentation) ainsi que dans le secteur privé (par exemple la sécurisation des personnes, les mesures d’audience, la réalisation d’actions de prospection ciblée ou l’analyse de la fréquentation d’une zone).

Dès lors que les personnes ne sont plus seulement filmées par des caméras, mais analysées de manière automatisée, la CNIL considère que les individus sont confrontés à une modification de la nature de la technologie, et non pas à une « simple évolution technologique ». De ce fait, cette technologie « invisible » et « sans contact » pourrait aboutir à un sentiment de surveillance généralisée et entraîner des risques importants pour les libertés individuelles et collectives des personnes.

C’est pourquoi, constatant l’absence de texte spécifique encadrant l’usage des dispositifs de vidéo « intelligente », la CNIL considère que la licéité du dispositif doit s’analyser au cas par cas, mais que dans tous les cas, dans la mesure où ces dispositifs captent des données personnelles, la réglementation applicable e

n matière de données à caractère personnel devra être respectée.

Dans les faits, la CNIL rappelle qu’il conviendra de définir des finalités déterminées, explicites et légitimes et une base légale appropriée. Le dispositif devra également être nécessaire et proportionné, et les personnes concernées devront être informées. De même, la réalisation d’une analyse d’impact et la désignation d’un DPO seront, en principe, obligatoires.

Enfin, sauf cas particulier des traitements statistiques, ces dispositifs devront être autorisés et encadrés par une norme juridique afin de passer outre l’article 23 du RGPD garantissant aux personnes concernées la possibilité de s’opposer au traitement de leurs données. Ce cadre légal devrait notamment prendre la forme d’une loi dès l’instant où ces dispositifs de caméras « intelligentes » seront mis en œuvre à des fins de police administrative ou de police judiciaire, conformément à l’article 34 de la Constitution.

Pour conclure, la CNIL rappelle que l’édiction d’un cadre juridique spécifique est souhaitable. Qu’il s’agisse d’interdire ou d’autoriser certains usages, la puissance publique doit tracer la ligne entre ce qu’il est possible de faire et ce qu’il ne l’est pas (socialement et éthiquement).

De même, en raison des risques nouveaux pour les droits individuels, la CNIL recommande de privilégier des dispositions moins impactantes et recommande que les usages de ces technologies soient le plus possible localisés et réservés aux cas où ils présentent (i) une plus-value, (ii) un lien avec l’intérêt général, et (iii) qu’ils soient assortis de garanties appropriées.

Lien vers la position de la CNIL : ici