CA Paris, 11ème ch., Pôle 5, 4 déc. 2015
Suite à la résiliation pour manquements graves par la filiale française du groupe IBM de trois contrats (un contrat-cadre et deux contrats d’application) portant sur la solution informatique développée par la société Prévensia, cette dernière a alors assigné sa cocontractante en paiement de dommages et intérêts pour résiliation abusive des contrats d’application du contrat cadre résilié.
Si le tribunal de commerce avait fait droit à cette demande en première instance, il avait toutefois limité la condamnation d’IBM France à la résiliation abusive d’un seul des contrats d’application (le contrat d’utilisation de la solution informatique), ce qui a poussé la société Prévensia à interjeter appel du jugement.
La Cour ne suit pas les arguments développés par IBM, qui se saisit des limites des fonctionnalités de la solution au regard de produits équivalents sur le marché, ainsi que du caractère incomplet des fonctionnalités, pour caractériser les manquements graves commis par Prévensia. La Cour considère, d’une part, que la constatation de solutions plus fonctionnelles sur le marché ne peut constituer un motif de résiliation du contrat et que IBM ne démontre pas, d’autre part, que l’utilisation extrêmement limitée d’une fonctionnalité, ni que son caractère prétendument incomplet, corresponde à un quelconque engagement contractuel.
La Cour relève en outre que, compte tenu de son domaine d’activité, IBM était parfaitement apte à appréhender les fonctionnalités de la solution informatique acquise. Partant, aucun manquement grave ne vient justifier la résiliation immédiate des contrats avant leurs termes par IBM.
La Cour confirme ensuite le jugement de première instance en ce qu’il a évalué la perte de marge de Prévensia à 80 % de la perte de son chiffre d’affaires (consacrant ainsi un taux de marge élevé pour l’activité d’édition de logiciels), du fait de la résiliation anticipée du contrat d’application d’utilisation de la solution, IBM s’étant engagée à ce titre pour une durée initiale ferme.
Enfin, en ce qui concerne le contrat d’application portant sur la commercialisation par IBM de la solution, la Cour relève que cet accord était non-exclusif, ne comportait aucun objectif de vente, ni de contrainte de commercialisation. Aussi, le préjudice de Prévensia ne peut s’analyser qu’en une perte de chance de conclure des contrats et en l’absence d’exclusivité, Prévensia ne peut faire valoir, pour caractériser son préjudice, qu’elle s’est abstenue de démarcher de potentiels clients.
La Cour vient donc confirmer le jugement de première instance en toutes ses dispositions.