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Lien hypertexte et contrefaçon

04 octobre 2016 | Derriennic Associés |

Y a-t-il contrefaçon par la mise en place d’un lien hypertexte renvoyant à des contenus contrefaisants ?

CJUE 8 septembre 2016 (Affaire C-160/15

La Cour de Justice de l’Union Européenne a rendu un arrêt très attendu dans l’affaire GS MEDIA contre Sanoma, sur le point de savoir si un lien hypertexte (i) placé sur un site internet et (ii) permettant l’accès à une œuvre publiée sur un autre site internet sans l’autorisation de son auteur, constitue ou non un acte de communication au public. En effet, aux termes de la Directive de 2001 sur les droits d’auteur, chaque acte de communication d’une œuvre au public doit être autorisé par le titulaire du droit d’auteur.

Prenant le contrepied des conclusions de l’avocat général, la Cour de Justice de l’Union Européenne a dégagé une solution et des critères d’appréciation du caractère condamnable ou non d’un tel acte aux bouleversements multiples.

En effet, la position de Cour dans son arrêt du 7 septembre dernier est la suivante :

Le placement d’un hyperlien sur un site internet vers des œuvres protégées par le droit d’auteur et publiées sans l’autorisation de l’auteur sur un autre site internet :

(i) ne constitue pas une communication au public lorsque la personne qui place ce lien agit sans but lucratif et sans connaître l’illégalité de la publication de ces œuvres ;

(ii) constitue un acte de communication au public :

(1) avéré, s’il est établi que la personne qui place l’hyperlien sait ou devait savoir que celui-ci donnait accès à une œuvre illégalement publiée (par exemple lorsque la personne a été avertie par les titulaires du droit d’auteur de l’illégalité) ou si le lien hypertexte permet aux utilisateurs de contourner des mesures de restriction prises par le site où se trouve l’œuvre protégée (par exemple, afin d’en restreindre l’accès à ses seuls abonnés) ;

(2) présumé, si le lien hypertexte est fourni dans un but lucratif (la Cour considérant, en pareil cas, qu’on attend de l’auteur du placement qu’il opère les vérifications nécessaires – la connaissance du caractère illégal de la publication sur l’autre site internet est ainsi être présumée, sauf preuve contraire).

Si cette décision laisse certains points en suspens tels que la définition de la notion de « but lucratif » (les blogs affichant des publicités ciblées et les sites vitrines d’un commerçant seront-ils considérés comme des sites poursuivant un but lucratif ?) et le degré de connaissance de l’illégalité du lien (preuve qui est d’ailleurs difficile à rapporter en pratique) qu’il appartiendra à la jurisprudence de préciser, elle invite les exploitants de site internet à la plus grande vigilance quant aux liens présents sur leur site.

Cet arrêt pourrait également impacter la législation française sur la responsabilité des intermédiaires techniques.

A suivre…