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Litige employeur / salarié : une preuve obtenue de façon illicite est-elle utilisable ?

29 mars 2024 | Derriennic Associés|

La Cour de cassation, dans un arrêt du 14 février 2024, a considéré que les images issues d’un dispositif de vidéosurveillance illicite pouvaient néanmoins être admises en tant que preuves dans le cadre d’une procédure de licenciement.

Une entreprise, ayant constaté des écarts de stocks importants, a placé certains de ses salariés sous une surveillance vidéo permanente pendant près de vingt jours et a utilisé, en tant que preuve, les images issues du dispositif de vidéosurveillance afin de justifier le licenciement d’une salariée fautive. La Cour de cassation a eu à apprécier de la recevabilité de ces images.

Un moyen de preuve obtenu de façon illicite

La salariée licenciée estimait que le système de vidéosurveillance utilisé par l’employeur était illicite, aux motifs suivants :

  • l’employeur n’a pas procédé à la consultation des représentants du personnel ;
  • l’employeur n’a pas porté ce dispositif de contrôle à la connaissance des salariés ;
  • ce systèmes de vidéosurveillance, installé dans un lieux ouvert au public, n’a pas reçu d’autorisation préfectorale ;
  • les salariés étaient placés, via ce système, sous une surveillance permanente pendant vingt jours, portant ainsi une atteinte disproportionnée à leur vie personnelle.

Pour la salariée, la cour d’appel aurait dû « rechercher si l’employeur ne pouvait pas atteindre un résultat identique en utilisant d’autres moyens plus respectueux de la vie personnelle du salarié ».

En l’espèce, pour la salariée, son employeur aurait pu utiliser un moyen de preuve moins intrusif, à savoir visionner les images de vidéosurveillance captées antérieures à la constatation de l’écart de stocks, plutôt que placer ses salariés sous une surveillance constante.

Un moyen de preuve obtenu de façon illicite peut néanmoins être recevable, s’il est indispensable à l’exercice du droit à la preuve et proportionné au but recherche

La chambre sociale de la Cour de cassation a rappelé que « l’illicéité dans l’obtention ou la production d’un moyen de preuve ne conduit pas nécessairement à l’écarter des débat ».

Pour la Cour de cassation, la juridiction du second degré a bien « mis en balance de manière circonstanciée le droit de la salariée au respect de sa vie privée et le droit de son employeur au bon fonctionnement de l’entreprise, en tenant compte du but légitime qui était poursuivi par l’entreprise, à savoir le droit de veiller à la protection de ses biens ».

La Cour de cassation a, en conséquence, confirmé le raisonnement de la Cour d’appel, qui avait estimé que les images issues du dispositif de vidéosurveillance étaient « indispensables à l’exercice du droit à la preuve de l’employeur et proportionnée au but poursuivi », de sorte que « les pièces litigieuses étaient recevables ».

Le rejet du pourvoi s’est donc imposé.

Il doit toutefois être rappelé, à toutes fins utiles, que l’illicéité du dispositif en cause met en lumière un certain nombre de manquements, notamment au RGPD, susceptibles d’engager la responsabilité de l’employeur.

Source : ici