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Premières décisions sur l’agrément PSAN : la date du dépôt de dossier d’agrément en question

17 mai 2021 | Derriennic Associés|

  • CE, 9-10 ch., 2 avr. 2021, n° 448415
  • CA Paris, pôle 5 – ch. 15, 14 avr. 2021, n° 20/18861
  • CA Paris, pôle 5 – ch. 15, 14 avr. 2021, n° 20/18862
  • CA Paris, pôle 5 – ch. 15, 14 avr. 2021, n° 20/18863

Pour la première fois, des juridictions ont à connaître de l’agrément des prestataires sur actifs numériques (PSAN) mis en place par la Loi PACTE. Depuis cette loi, l’acronyme PSAN désigne les professionnels qui effectuent des opérations sur cryptoactifs (cryptomonnaies et tokens) en France ou à destination du public français.

Pour rappel, les entreprises qui exercent les activités mentionnées aux alinéas 1° à 4°de l’article L. 54-10-2 du Code monétaire et financier doivent au préalable obtenir l’agrément de l’AMF. A ce jour, seuls 14 agréments ont été délivrés par l’AMF, dont 7 en 2020 et trente étaient en cours d’instruction en décembre 2020 selon le Rapport annuel de l’AMF 2020.

Il existe une subtilité posée à l’article 64-X° de la Loi PACTE pour les entreprises qui exerçaient une activité PSAN soumise à agrément avant le 18 décembre 2019. Ces entreprises bénéficiaient d’un délai d’un an à compter de cette date pour recevoir l’agrément. Au contraire, les entreprises qui commençaient leur activité PSAN à compter du 18 décembre 2019 devaient recevoir leur agrément avant de commencer leur activité. C’est cette subtilité qui a fait l’objet de quatre décisions : trois rendues par la chambre commerciale de la Cour d’appel de Paris et une par le Conseil d’Etat.

Trois sociétés exerçaient une activité de PSAN antérieurement au 18 décembre 2019 et bénéficiaient ainsi du délai d’un an pour recevoir l’agrément. Elles avaient donc jusqu’au 18 décembre 2020, en sachant que l’AMF doit traiter le dossier d’agrément en six mois, délai au terme duquel l’AMF est réputée avoir accepté le dossier d’agrément.

En septembre 2020, l’AMF produit un communiqué dans lequel elle établit une F.A.Q. pour les PSAN désirant s’enregistrer. Elle y précise que le 18 décembre 2020 n’est pas la date limite pour déposer son dossier mais la date limite pour être agréé. Pour être agréé à temps, il eût fallu que tous les PSAN qui exerçaient leur activité avant le 18 décembre 2020 dépose leur dossier au plus tard le 18 juin pour être certains d’obtenir un agrément au 18 décembre.

Le jour du délai butoir du 18 décembre, alors qu’elles avaient déposé leur dossier un mois plus tôt, les sociétés reçoivent de l’AMF une lettre leur expliquant qu’elles doivent cesser tout exercice et toute protection de leur activité PSAN soumises à enregistrement obligatoire.

Les sociétés exercent alors chacune trois types de recours différents : d’abord, devant le Conseil d’Etat, un référé suspension contre la légalité de la doctrine de l’AMF de septembre de 2020 ; ensuite, devant la Cour d’appel de Paris, une requête en sursis à exécution de l’injonction de l’AMF de cesser leur activité et toute prospection ; et, enfin, un recours au fond en annulation devant cette même Cour.

Les sociétés sont déboutées de l’ensemble de leurs demandes devant le Conseil d’Etat qui considère que la doctrine de l’AMF est conforme au texte de la Loi PACTE qui exigeait effectivement que les sociétés soient enregistrées au 18 décembre 2020, et non que les sociétés aient déposé leur dossier.

En revanche, les demandes des trois sociétés sont accueillies favorablement par la Cour d’appel de Paris qui ordonne le sursis à exécution des décisions de l’AMF en ce qu’il existe une irrégularité de procédure de nature à sérieusement menacer l’annulation de la décision (notamment en l’absence de mise en demeure préalable par l’AMF) et des conséquences manifestement excessives à maintenir la décision en l’attente d’une décision au fond (notamment eu égard aux conséquences économiques pour des sociétés qui doivent cesser leur activité et toute prospection pendant plusieurs mois).

Les sociétés peuvent donc continuer d’exercer leur activité PSAN postérieurement au 18 décembre 2020 en l’absence d’agrément, jusqu’à ce que la Cour d’appel se prononce sur le fond. Faut-il penser que la Cour d’appel rejoindra les conclusions du Conseil d’Etat lorsqu’elle statuera au fond ?

A suivre …

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