
La Cour d’appel d’Aix en Provence, aux termes d’un arrêt du 3 juin 2025 (CA Aix en Provence, 3 juin 2025, n° 24/03827) a reconnu la faute inexcusable de l’employeur d’un salarié ayant été victime d’un syndrome anxio-dépressif après avoir assisté à la chute de son collègue, rappelant que la conscience du danger s’étend aussi aux traumatismes psychiques de victimes collatérales.
Un accident du travail d’origine psychologique
En l’espèce, un salarié a développé un syndrome anxio-dépressif après avoir vu son collègue chuter lourdement d’une toiture sur un chantier. La CPAM a reconnu l’accident au titre des risques professionnels.
Le salarié a ensuite demandé la reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur, reprochant l’absence de mesures de sécurité adaptées.
En première instance, le pôle social du tribunal judiciaire a retenu la faute inexcusable et ordonné une expertise médicale. L’employeur, représenté par son liquidateur, a interjeté appel.
La faute inexcusable confirmée en appel
La cour d’appel confirme le jugement en s’appuyant sur trois éléments clés :
- Condamnation pénale : cette condamnation intervenue pour blessures involontaires liées à l’absence de respect des règles de sécurité démontre que l’entreprise avait nécessairement conscience du danger.
- Risque identique : le salarié exposé travaillait dans les mêmes conditions que la victime directe de la chute. Ses lésions, bien que psychologiques, résultent du même danger de chute.
- Prévisibilité du traumatisme : l’employeur devait savoir que la chute d’un collègue pouvait provoquer des conséquences psychotraumatiques chez les salariés exposés au même risque.
Ainsi, la cour juge indifférent que le salarié n’ait pas subi d’atteinte physique directe : l’accident reste imputable à la faute inexcusable de l’employeur.
Portée : élargissement du champ de la faute inexcusable
La décision s’inscrit dans une tendance jurisprudentielle d’élargissement de la faute inexcusable aux atteintes psychiques : il n’est pas nécessaire que la lésion soit corporelle dès lors qu’elle est directement causée par un manquement à l’obligation de sécurité. Ce raisonnement fait écho à d’autres arrêts en matière de harcèlement moral ou d’accidents du travail psychiques, où les juridictions rappellent que l’obligation de sécurité de l’employeur couvre aussi la santé mentale.
En confirmant la faute inexcusable malgré l’absence de lésion physique directe, la cour d’appel d’Aix-en-Provence souligne la vigilance accrue imposée aux employeurs : le risque psychique est aussi un risque professionnel et ce, quand bien même il s’agirait d’une victime collatérale.