Cass. Soc., 3 avril 2024, n°23-10.931
Prévenir par téléphone le salarié, le jour même de l’envoi de sa lettre, peut-il s’analyser en licenciement verbal, privant de cause réelle et sérieuse ?
Dans cet arrêt du 3 avril 2024, la Cour de cassation répond par l’affirmative.
Le principe est connu : toute décision de l’employeur manifestant sa volonté irrévocable de mettre fin au contrat et intervenant avant la notification du licenciement s’analyse en un licenciement verbal privé, dès lors, de toute cause réelle et sérieuse.
Ici, le salarié estimait que son licenciement était intervenu oralement le jour même de l’envoi de la lettre de licenciement. La DRH avait en effet souhaité prévenir le salarié par téléphone de l’envoi de sa lettre de licenciement, afin notamment qu’il ne se présente pas en réunion d’équipe le lendemain. La pratique est courante et doit inviter à la plus grande vigilance.
En l’espèce, le salarié avait en effet mis son interlocutrice sur haut-parleur, de sorte que ses collègues de travail avaient pu témoigner, par la suite et dans le cadre du procès prud’homal, de la teneur de leur entretien téléphonique.
La cour d’appel avait donné raison au salarié, en jugeant son licenciement sans cause réelle et sérieuse au motif que l’appel téléphonique de la DRH informant le salarié de son licenciement le jour même de l’envoi de sa lettre s’analysait en un licenciement verbal. Devant la Cour de cassation, l’employeur estimait que le salarié devait encore rapporter la preuve que cette information verbale était intervenue avant l’expédition de la lettre. La Cour de cassation ne retient pas l’argument. Elle estime que, l’appel téléphonique ne pouvant suppléer la lettre de licenciement adressée ultérieurement, fût-ce le même jour, la Cour d’appel a donc pu en déduire exactement que le licenciement était intervenu verbalement et devait donc être jugé comme dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Cette décision invite donc à la plus grande vigilance et à éviter, aussi louable soit l’intention, de prévenir le salarié, y compris oralement, avant que la lettre de licenciement ne soit effectivement expédiée.