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Mise en ligne d’une œuvre librement accessible sur la toile : l’autorisation de l’auteur peut être requise

01 octobre 2018 | Derriennic Associés |

CJUE 7 août 2018 (C-161-17)

Cet été, la Cour de Justice de l’Union Européenne a jugé que la mise en ligne sur un site internet d’une photographie qui a été préalablement publiée sur un autre site Internet (i) sans restriction empêchant son téléchargement et (ii) avec l’autorisation du titulaire du droit d’auteur, nécessite une nouvelle autorisation de ce dernier.

La Cour a d’abord considéré qu’une telle mise en ligne (la photographie en cause avait été préalablement copié sur un serveur privé) doit être qualifiée de « mise à disposition » et donc d’ « acte de communication » au sens de la Directive sur le droit d’auteur.

Ensuite, elle a estimé qu’il s’agit d’une mise à disposition d’un public nouveau : le public pris en compte par l’auteur dans son autorisation donnée au premier site est constitué des seuls utilisateurs dudit site (en l’occurrence de voyages), tandis que celui du second site (d’une école) comprend les utilisateurs du site, mais également les autres internautes.

Cette position a pu surprendre, s’agissant dans les deux cas de sites internet ouverts à tous les internautes, faute de mesures de restrictions mises en place (type identification/abonnement, etc.).

En effet, dans sa jurisprudence antérieure (arrêts Sevensson, Bestwater, GSMédia), la CJUE a jugé qu’une œuvre mise en ligne sur un site internet sans restriction d’accès avec l’accord du titulaire du droit d’auteur, était réputée avoir été mise à disposition d’un public composé de l’ensemble des utilisateurs d’internet, de sorte que la création, par un tiers, d’un lien hypertexte vers cette œuvre ne constituait pas un nouvel acte de communication au public soumis à autorisation.

Mais, pour la Cour, l’acte de mise en ligne d’une œuvre sur un site second, laquelle était librement accessible sur un site premier doit être distingué de celui de la création d’un lien hypertexte sur un site second renvoyant au site premier sur lequel figure cette œuvre.

Pour ce faire, les juges européens ont notamment rappelé l’importance de la technique des liens hypertextes dans l’exercice de la liberté d’expression sur internet,  et considéré qu’elle l’était dans une moindre mesure via l’intégration, en tant que telle, d’une œuvre dans un site second.

Les Juges ont également souligné le fait que dans ce dernier cas, si l’auteur décidait de mettre fin à la communication de son œuvre sur le premier site, elle continuerait à être communiquée sur le second site ce, indépendamment de sa volonté (au contraire du lien hypertexte qui renverrait alors à un contenu inexistant). Enfin, la Cour a retenu un « rôle décisif » du gestionnaire du site internet second compte tenu de la reproduction préalable de cette œuvre sur un serveur privé.

Récupérer une œuvre librement accessible sur la toile et la diffuser sur un autre site internet n’est donc pas un acte anodin et doit, en principe, avoir été préalablement autorisé par l’auteur de cette œuvre.