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Le refus pour un client de régulariser un contrat de maintenance à l’issue d’un contrat de développement peut constituer un manquement susceptible d’exonérer le prestataire de toute responsabilité

09 avril 2025 | Pierre de Boismenu|

Le refus pour un client de régulariser un contrat de maintenance à l’issue d’un contrat de développement peut constituer un manquement susceptible d’exonérer le prestataire de toute responsabilité

Par un arrêt du 21 mars 2025, la Cour d’appel de Paris est venue fournir des éclairages sur ce qu’on pourrait désigner « l’attitude contractuelle » que doit adopter un client dans le cadre d’un projet informatique. En effet, celui-ci peut se voir reprocher de ne pas avoir régularisé le contrat de maintenance qui aurait pu permettre de corriger les défaillances dont il se prévalait. Il rappelle également la nécessité, pour un client, de s’assurer que la clause de « garantie post-production », le protège efficacement.

Les faits

En l’espèce, un éditeur de sites de rencontres avait confié à un prestataire informatique la refonte de deux sites au travers d’un contrat de développement (d’une valeur initiale d’environ 145.000€) qui devait déboucher, à l’issue d’une période de « garantie post-production » de deux mois à un contrat de maintenance et d’infogérance.

Suite à la mise en production d’un des sites, le client a dénoncé de multiple dysfonctionnement et refusé de mettre en œuvre la maintenance : estimant que les anomalies constatées devaient être corrigées dans le cadre de la garantie précitée.

En dépit d’un plan d’action proposé par le prestataire, le client a fait assigner celui-ci au titre des divers préjudices dont il s’estimait victime (coûts de redéveloppements, perte de chiffre d’affaires, pénalités de retard) et qui résultaient, selon lui, des nombreuses défaillances du prestataire  (défaut de communication de certains livrables documentaires, défaut de conformité des livrables techniques matérialisés par des bugs et des anomalies, absence de tests de charge, défaut de délivrance dans les délais contractuels et fuite de données).

Il estimait notamment que l’ensemble de ces défaillances (et les rallonges budgétaires sollicitées par le prestataire informatique pour auditer son propre travail) démontraient que celui-ci avait été dépassé par l’ampleur du projet qui était vicié par des problèmes originels de conception.

De son côté, le prestataire, en réponse aux griefs formulés par son client, le prestataire invoquait de nombreuses évolutions du besoin, et surtout le fait qu’il avait traité les bugs conformément aux dispositions du contrat et au-delà de la période de garantie post-production prévue au contrat. Il estimait en outre que le client avait accusé des retards conséquents dans le règlement des factures.

Débouté en première instance le client a finalement interjeté appel en 2022.

Sur les manquements

Dans une décision qui peut sembler sévère pour le client, la Cour d’appel rappelle tout d’abord que s’agissant des retards dans la remise des éléments objet du contrat (les sites internet) un avenant avait reporté la date de mise en production qui avait, in fine, été respectée par le prestataire.

Elle constate ensuite que le client a refusé de régulariser le contrat de maintenance, invoquant que les bugs révélés en phase de recette devaient être corrigés dans le cadre du contrat de développement.

La Cour d’appel considère néanmoins que la phase de « garantie post-production » prévue au contrat était expirée de sorte que le prestataire avait donc continué à corriger des bugs et des anomalies en dehors de tout cadre contractuel, et donc, en partie, à titre gratuit. Elle estime ainsi que le prestataire, en versant aux débats la preuve de ses nombreuses diligences, la résolution des tickets ouverts au-delà de la durée contractuelle de la garantie, justifie avoir correctement exécuté ses obligations contractuelles.

 Elle en tire la conclusion que le client, en refusant de régulariser le contrat de maintenance, a :

  • privé la société Arkeup de la possibilité d’intervenir dans ce cadre pour remédier aux « bugs » divers qui pouvaient être relevés. Comme il a été développé supra, la société Arkeup a néanmoins poursuivi ses interventions sur le site domi.com pour répondre aux demandes de son client.

Autrement dit, il est reproché au client de n’avoir pas accepté la régularisation d’un contrat de maintenance à l’issue de la phase de garantie post-production, privant ainsi le prestataire de corriger les bugs constatés.

La Cour ne donne pas de précisions sur la façon dont était libellée la clause de garantie post-production mais il peut sembler sévère de reprocher à un client de refuser de basculer en phase de maintenance alors que la recette réalisée en phase de développement ne donnait pas satisfaction.

Sur les anomalies justifiant le ‘blocage’ du client, la Cour estime justement qu’ils n’étaient pas matérialisés. Plus précisément, elle considère que les captures d’écran figurant dans les constats d’huissier (traduisant l’insatisfaction des utilisateurs et la matérialité des dysfonctionnements) étaient difficilement exploitables et surtout ceux produits par le prestataire, aboutissant, sur les mêmes sujets, à des conclusions diamétralement opposées. 

Face à une telle opposition dans les conclusions des huissiers, la Cour estime qu’ils sont, en conséquent, tous deux démunis de force probante.

Sur les préjudices (et le lien de causalité avec les défaillances invoquées)

La Cour juge par ailleurs que certaines défaillance du prestataire étaient caractérisées (notamment la remise de certains livrables documentaires) mais que le lien de causalité entre cette défaillance et les préjudices invoqués n’est pas établi (curieusement, le client ne réclamait pas le remboursement des sommes versées, demande à laquelle il aurait sans doute été fait droit, au moins partiellement, puisque le juge reconnaissait que certaines prestations n’avaient pas été réalisées par le prestataire). 

Source : Cour d’appel, Paris, Pôle 5, chambre 11, 21 Mars 2025 – n° 22/17566

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