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Créations salariées :  un assouplissement jurisprudentiel dans la rédaction du contrat de travail ?

07 février 2023 | Derriennic associés|

Point d’attention lors de la rédaction et négociation de vos contrats de travail : la cession des œuvres réalisées dans le cadre du contrat de travail, au fur et à mesure de leur réalisation, et sans autre contrepartie que le salaire, serait valable.

Une styliste avait conclu un contrat de travail avec une société. Classiquement ce contrat comportait une clause de cession de droits sur ses créations, au profit de l’employeur.

La salariée a exigé de son employeur le paiement de sommes complémentaires, en sus de son salaire, correspondant aux recettes encaissées par l’employeur du fait de l’exploitation des œuvres qu’elle avait réalisé. Face à son refus, elle l’a assigné en revendication de droits d’auteur et en paiement.

La salariée considérait la clause de cession de droits comme étant nulle au motif notamment :

  • qu’elle portait sur une cession globale d’œuvre future ;
  • qu’elle était dénuée de contrepartie financière.

La Cour d’appel de Paris, confirmant le jugement de première instance, a débouté la salariée de l’ensemble de ses demandes.

La Cour d’appel considère qu’une « telle clause n’est pas nulle dès lors qu’elle délimite le champ de la cession à des œuvres déterminables et individualisables à savoir celles réalisées par la salariée dans le cadre du contrat de travail et au fur et à mesure que ces œuvres auront été réalisées. Ainsi, la clause de cession n’encourt pas le grief de cession globale d’œuvres futures puisqu’elle ne vise pas globalement les œuvres objet de la cession en outre, elle ne porte pas sur des œuvres futures mais sur des œuvres réalisées, la cession n’opérant qu’au fur et à mesure de la réalisation ».

Sur l’absence de rémunération de la cession de droits en propre, la Cour considère qu’« une rémunération forfaitaire n’opérant pas de distinction entre la rémunération de la prestation de travail et la contrepartie de la cession des droits d’auteur est licite ». Peu importe, donc, qu’il n’y ait pas de rémunération distincte de la cession de droit, celle-ci pouvant être comprise dans le salaire.

Un arrêt à prendre en considération lors de la rédaction et la négociation des contrats de travail. 

Après l’arrêt récent de la Cour d’appel de Montpellier concernant un pacte d’actionnaire (cf : précédent article), c’est désormais la Cour d’appel de Paris qui adopte une approche particulièrement souple du principe de prohibition des clauses de cession globales d’œuvre futures dans le contexte de créations salariées. La tendance des juges du fond semble être à davantage de sécurité juridique et de prévisibilité pour les employeurs, au détriment des auteurs personnes physiques.

En sera-t-il de même de la Cour de cassation ?

Affaire à suivre.

Source : ici