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Dénigrer son employeur sur LinkedIn peut coûter cher, même après son licenciement

02 mars 2023 | Derriennic Associés|

CA Reims, 11 janv. 2023, n°21/01836

La Cour d’appel de Reims confirme, dans un arrêt du 11 janvier 2023, que tout employeur peut faire condamner un ancien salarié dans l’hypothèse où celui-ci dénigre l’entreprise sur les réseaux sociaux.

En l’espèce et à l’occasion d’un litige prud’homal concernant à titre principal son licenciement pour motif économique, un employeur sollicitait la condamnation d’un ancien salarié au motif que celui-ci avait, postérieurement à son licenciement, dénigré l’entreprise ainsi que son directeur commercial, sur sa page LinkedIn, visible des clients et fournisseurs. Le salarié soulevait l’incompétence du conseil de prud’hommes pour statuer sur cette demande, dès lors que les dénigrements dommageables étaient survenus postérieurement à la rupture du contrat de travail, si bien qu’il ne pouvait être condamné à ce titre par une juridiction prud’homale pour des faits commis à une époque où il n’avait plus la qualité de salarié.

La Cour d’appel écarte l’argument, rappelant que le conseil de prud’hommes est compétent pour connaître des différends qui peuvent s’élever à l’occasion de tout contrat de travail. Elle en déduit que la compétence prud’homale peut s’étendre aux litiges concernant des faits postérieurs à la rupture du contrat de travail s’ils trouvent leur source dans le contrat de travail et sont en relation directe avec lui. Elle relève ensuite qu’au cas d’espèce, l’ancien salarié avait, sous la qualité de « responsable achats » de l’entreprise publié des messages tels que « Juste un semblant d’entreprise dirigée par un blaireau qui a fait soi-disant de grandes écoles » ou encore « je me marre. Cela leur coûte 30 euros et il vous le font payer à 300. Clients fuyez, fournisseurs fuyez. Acheter à l’étranger avec des compositions chimiques un peu douteuses, mais par contre vendu au prix fort » et qu’en s’exprimant ainsi, le salarié avait non seulement communiqué des éléments confidentiels dont il avait eu connaissance dans le cadre de son travail, mais encore dénigrant et insultant vis-à-vis du chef d’entreprise. Pour ces raisons, l’intéressé est condamné à des dommages-intérêts, minorés toutefois à 1.500 €. Toute vérité n’est donc pas bonne à dire.

L’apport de l’arrêt est double. Il rappelle d’une part, que certaines obligations (confidentialité notamment) survivent à la rupture du contrat de travail mais encore, d’autre part, que les circonstances de la rupture, ici pour motif économique, sont sans incidence sur la responsabilité civile encourue par le salarié. Attention donc aux commentaires postérieurs sur les réseaux sociaux qui n’échappent pas à ce que rappelait Camus : « Un homme est toujours la proie de ses vérités ».