Cass. soc. 11-12-2019 n° 17-24.179 FS-D, Sté Fiducial Private Security c/ G. ; Cass. soc. 11-12-2019 n° 18-11.792 FS-PB, Caisse régionale de Crédit agricole mutuel
Un dispositif de surveillance destiné à la sécurité de l’entreprise qui a pour finalité de contrôler l’activité des salariés doit faire l’objet d’une information préalable des salariés et être soumis à l’information et consultation préalable du Comité social et économique.
Dans ces deux arrêts du 11 décembre 2019 de la Cour de cassation, des salariés ont été licenciés pour un comportement fautif détecté à l’aide d’un outil de contrôle qui n’avait pas pour objectif principal le contrôle de l’activité des salariés. Pour l’employeur ces éléments de preuve étaient recevables en justice sans avoir à justifier ni de l’information-consultation préalable des représentants du personnel ni de l’information des salariés sur ce dispositif de contrôle.
Il ressort de l’analyse combinée de 2 arrêts que le raisonnement de l’employeur n’est recevable que si le système de surveillance en cause n’est effectivement pas utilisé pour contrôler l’activité des salariés. A défaut, il doit avoir consulté le CSE et informé les salariés de l’existence de ce dispositif de surveillance, faute de quoi il n’est pas autorisé à collecter des données personnelles des salariés ni à se prévaloir des éléments de preuve recueillis au moyen de ce dispositif illicite pour établir une faute du salarié.
Dans la première affaire, un agent de surveillance est accusé de tentative de vol par un client dont il était chargé de surveiller les locaux. Ces faits sont révélés par les enregistrements des caméras installées dans le sous-sol de l’entreprise cliente, sur lesquels on le voit fracturer un placard. La Cour d’appel s’est fondée sur l’absence d’information du salarié quant à l’existence de ces caméras pour écarter la recevabilité comme moyen de preuve de ces enregistrements.
En l’espèce, la Cour de cassation relève qu’il ne résulte pas de la décision de la cour d’appel que ce dispositif de surveillance des locaux avait été utilisé avec pour finalité de contrôler le salarié dans l’exercice de ses fonctions. La décision des juges du fond est en conséquence censurée par la Cour de cassation qui admet la recevabilité des enregistrements comme moyen de preuve de la faute du salarié.
Dans la seconde affaire, un système informatique de contrôle des opérations effectuées dans les établissements de crédit et dans les entreprises d’investissement, destiné à assurer la sécurité des données bancaires et une maîtrise des risques.
Ce système était également doté d’un outil de traçabilité permettant de restituer l’ensemble des consultations effectuées par un salarié, lequel avait révélé qu’un salarié procédait à des consultations autres que celles correspondant aux clients de son portefeuille.
L’intéressé contestait son licenciement pour faute grave motivé par les consultations abusives détectées grâce cet outil.
Les juges du fond, dont le raisonnement est approuvé par la chambre sociale de la Cour de cassation, décident que dès lors que le dispositif était utilisé pour contrôler les consultations du salarié, l’employeur aurait dû informer et consulter le comité d’entreprise sur l’utilisation de ce dispositif à cette fin. Comme il ne l’a pas fait, il ne peut pas se prévaloir des éléments de preuve ainsi recueillis pour prouver la faute du salarié, lesquels ont par conséquent été écartés des débats.
La solution est transposable au comité social et économique qui, en application de l’article L 2312-38 du Code du travail, doit être consulté sur les moyens et techniques permettant un contrôle de l’activité des salariés.
Dès lors, il convient d’être extrêmement vigilent quant à la nature de l’information donnée aux salariés et aux IRP : la finalité du système ou son utilisation éventuelle à des fins de contrôle doit être exprimée clairement, faute de quoi le salarié obtiendra automatiquement que ces documents soient écartés des débats.