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La CEDH fait primer la liberté d’expression sur le « droit au référencement »

21 décembre 2017 | Derriennic Associés|

CEDH 19 octobre 2017 Fuchsmann c. Allemagne (requête n°71233/13)

La Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH) a tranché en faveur de l’intérêt public au détriment du droit au respect de la vie privée s’agissant d’une demande de suppression d’un article de presse en ligne.

L’article en question relatait une enquête sur des soupçons de corruption impliquant des entreprises de média. Le dirigeant de l’une de ces entreprises y était décrit comme un escroc, interdit de séjour aux Etats-Unis et dont l’entreprise appartenait à un réseau lié à la criminalité organisée russe.

S’étant vu refuser la suppression de l’entier article par les juridictions nationales saisies (seul le retrait du passage sur l’interdiction d’entrée aux Etats-Unis avait été accueilli), le dirigeant en question a saisi la CEDH en invoquant une violation de son droit au respect de la vie privée consacré par l’article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme.

Toutefois, la CEDH a rejoint les conclusions des juges nationaux quant à leur appréciation de l’équilibre entre le droit à la vie privée du requérant et la liberté d’expression du journal concerné (protégée par l’article 10 de la convention).

En l’espèce, la Cour a plus précisément estimé que :

  • l’article litigieux contribuait à un débat d’intérêt public (les soupçons de la participation d’un homme d’affaires à des actes de corruption, etc.) et qu’il y ainsi avait un intérêt public à laisser cet article en ligne ;
  • le dirigeant concerné était « connu » de par sa position dans la société et revêtait ainsi la qualité de « personnage public » (conformément à la jurisprudence de la CEDH) ;
  • les informations contenues dans l’article reposaient sur une base factuelle suffisante, sans insinuations, ni déclarations polémiques, mais relevaient plutôt de la vie professionnelle du requérant sans détail sur son intimité.

En conséquence, la CEDH a conclu qu’il n’y a pas eu violation du droit fondamental au respect de la vie privée du dirigeant.

Il s’agit d’une décision de la CEDH favorable, encore une fois, à la liberté de la presse, qui vient à nouveau illustrer l’appréciation de la notion d’intérêt général comme « limite » au droit au déférencement (issu de l’arrêt de la CJUE du 13 mai 2014 dans l’affaire C-131/12 « Costeja contre Google ».