Les juges appliquent la clause contractuelle de résiliation anticipée qui organisait la possibilité de mettre un terme au projet d’implémentation de l’ERP, sans indemnité, ni compensation, ni préavis, à l’issue de la phase d’analyse préalable, dans le cas d’une réestimation du budget pour mener à bien le projet, le prestataire échouant à démontrer la mauvaise foi du client. La clause prévoyait le remboursement, des sommes réglées par le client au titre des licences et abonnement, que ce dernier peut donc réclamer, mais il n’obtiendra pas réparation en complément de son préjudice financier allégué.
Une société ayant pour activité la production et commercialisation de produits de beauté et matériel médical souhaite consolider la totalité de l’information de son groupe en un système intégré. Elle décide d’implanter un ERP et se rapproche d’une prestataire informatique. Les parties signent en décembre 2018 un contrat de « Mise en œuvre d’un système d’information ERP » relatif à l’implantation complète de l’ERP intégrant le logiciel d’un éditeur.
Début 2020, le client résilie par anticipation le contrat tout en réclamant le remboursement des sommes réglées. Le prestataire s’y refusant, il est assigné.
Le tribunal de commerce de Meaux condamne l’intégrateur à rembourser mais déboute le client de sa demande à titre de dommages et intérêts visant à l’indemnisation des sommes dont il avait dû s’acquitter en raison des manquements du prestataire.
Le prestataire interjette appel considérant que le client n’a pas exécuté le contrat de bonne foi, obligation d’ordre public en matière contractuelle, qu’il s’agissait pour ce dernier d’orchestrer l’abandon unilatéral du projet, sans en subir les conséquences, sous couvert de l’application d’une clause contractuelle relative à la résiliation anticipée du contrat, alors qu’il était en pourparlers avec un autre intégrateur. Il en demande réparation, faisant état de son manque à gagner et investissement en pure perte.
Le prestataire reprochait en particulier au client d’avoir modifié ses besoins au cours de la première étape du projet alors que le client soutenait que le prestataire n’était pas parvenu à répondre aux besoins qu’il devait assurer en raison de ses propres défaillances.
La cour va analyser le contrat, le déroulement du projet et les conditions de résiliation.
Elle relève d’une part que le projet comportait plusieurs étapes commençant par une analyse préalable devant s’achever par la remise d’un rapport, et qu’un article organisait la possibilité de résiliation anticipée à l’issue de cette phase, dans les cas d’une réestimation budgétaire au-delà d’un certain seuil pour mener à bien le projet et ce, dans le strict périmètre défini par le cahier des charges. La clause prévoit que dans ce cas la résiliation donne lieu au remboursement des sommes réglées par le client au titre des licences logicielles et des contrats d’abonnement, les prestations effectivement réalisées conformément aux stipulations du contrat restant dues.
Elle considère d’autre part que le client a bien résilié le contrat en se référant à cet article et à différents manquements notamment d’absence de fonctionnalités, les ajouts dépassant le budget supplémentaire prévu, cette décision faisant suite à des comités de pilotage.
Les juges déduisent de ces éléments que la résiliation a été prononcée tant sur la forme que sur le fond conformément aux dispositions du contrat et qu’aucun manquement sur le dépassement du périmètre initial ne résulte des échanges entre les parties, le prestataire ne caractérisant pas les fautes imputées au client ni le détournement de la procédure de résiliation anticipée.
Le jugement est par conséquent confirmé, à l’exception du décompte des sommes réglées à rembourser par l’intégrateur, révisées à la baisse. La condamnation complémentaire, sollicitée par le client pour préjudice financier est également rejetée. La mobilisation de son personnel n’a pas créé de charges supplémentaires et les sommes engagées correspondent à des prestations commandées auprès de tiers, susceptibles d’être mises à la disposition de la société qui s’est substituée à l’intégrateur écarté pour l’exécution de la mission interrompue.
Source : Cour d’appel de Paris, Pôle 5, Chambre 10, Arrêt du 21 novembre 2022, Répertoire général nº 22/02182