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Les adresses courriels et IP ne sont pas des « adresses » au sens la directive européenne relative au respect des droits de propriété intellectuelle

03 août 2020 | Derriennic Associés|

Cour de justice de l’Union européenne, 5ème ch., arrêt du 9 juillet 2020

Dans un arrêt rendu le 9 juillet 2020, la Cour de Justice de l’Union Européenne est venue circonscrire la notion « d’adresses » telle que visée à l’article 8, paragraphe 2, sous a), de la directive 2004/48/CE du 29 avril 2004, relative au respect des droits de propriété intellectuelle.

Pour rappel, la directive 2004/48/CE prévoit la possibilité pour les autorités judiciaires d’ordonner la fourniture d’informations sur l’origine et les réseaux de distribution des marchandises ou des services qui portent atteinte à un droit de propriété intellectuelle. Parmi ces informations figurent notamment les « adresses » des producteurs, distributeurs et fournisseurs des marchandises ou des services contrefaisants.

En l’espèce, en 2013 et 2014, deux films ont été téléversés par plusieurs utilisateurs de la plateforme vidéo YouTube, sans l’accord préalable du titulaire des droits d’exploitation exclusifs sur ces œuvres en Allemagne.

Ces derniers ont été visionnés plusieurs dizaines de milliers de fois. Le titulaire des droits a alors exigé, que la plateforme YouTube lui fournisse un ensemble d’informations relatives à chacun des utilisateurs ayant procédé aux téléversements litigieux parmi lesquelles figuraient les adresses courriels et IP.

La plateforme a refusé de fournir les informations relatives à ses utilisateurs et en particulier, leurs adresses courriel et numéros de téléphone ainsi que les adresses IP utilisées par ceux-ci tant au moment du téléversement des fichiers concernés qu’au moment du dernier accès à leur compte YouTube.

La question préjudicielle portée devant la Cour de Justice de l’Union Européenne consistait à déterminer si de telles informations relevaient de la notion d’« adresses », au sens de la directive 2004/48.

La Cour de Justice de l’Union Européenne a répondu par la négative considérant que la notion d’ « adresses » était une notion autonome de droit européen qui devait s’entendre au sens stricte, c’est-à-dire comme le lieu de domicile ou de résidente d’une personne déterminée.

Toutefois, la Cour de Justice de l’Union Européenne est venue nuancer cette position en précisant que les États membres avaient la faculté d’accorder aux titulaires de droits de propriété intellectuelle le droit de recevoir une information plus étendue, sous réserve, toutefois, que soit assuré un juste équilibre entre les différents droits fondamentaux en présence et du respect des autres principes généraux du droit de l’Union, tels que le principe de proportionnalité.

Aussi, la possibilité pour les titulaires de droits d’avoir accès aux adresses courriels et IP des contrefacteurs n’est pas totalement fermée. Toutefois, ces derniers devront justifier que leur communication constitue une atteinte proportionnée au droit de la protection des données à caractère personnel. Ce qui ne devrait pas être une mince affaire.