En l’espèce, un premier contrat de travail temporaire avait été conclu le 12 novembre 2013, pour accroissement temporaire d’activité en raison de « commandes de certains clients ». De nombreux contrats de mission s’étaient ensuite succédés jusqu’au 23 mars 2016, entrecoupés, comme habituellement, de périodes d’inactivité. La relation de travail ayant cessé, le salarié a saisi la juridiction prud’homale le 18 juillet 2016, sollicitant la requalification de l’ensemble de sa relation contractuelle en CDI auprès de l’entreprise utilisatrice, au motif que la réalité du motif de recours n’était pas démontrée et que sa succession de CDD ne visait qu’à pourvoir un emploi durable et permanent au sein de celle-ci. L’entreprise utilisatrice invoquait une fin de non-recevoir fondée sur la prescription, estimant que le délai pour agir en requalification se prescrit par deux ans et que, dans l’hypothèse où les contrats conclus ne se succèdent pas strictement mais comportent entre eux des périodes d’inactivité, ce délai est décompté contrat par contrat au regard de la date de saisine de la juridiction prud’homale. La société concluait donc que le salarié était prescrit pour toute période contractuelle antérieure à la date du 18 juillet 2014. Mauvaise interprétation selon la Cour de cassation, ici protectrice des intérêts du salarié. La Cour de cassation juge en effet que le délai de prescription de l’action en requalification fondée sur le motif du recours au contrat de mission, a pour point de départ le terme du dernier contrat et que le salarié est en droit de faire valoir les droits correspondant à un CDI prenant effet au premier jour de sa première mission irrégulière, peu important que les différents contrats précaires aient été séparés de périodes d’inactivité, ces dernières n’ayant pas d’effet sur le point de départ du délai de prescription.
Source : Cass. Soc. 11 mai 2022, n°20-12.274, 20-12.273 et 20-12.271