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L’obligation contractuelle de moyens n’est pas un frein à la condamnation du prestataire informatique

16 novembre 2023 | Derriennic associés|

Le client ayant adressé un cahier des charges à son prestataire, base du devis accepté, le prestataire connaissait les contraintes de son client. En l’absence de délivrance conforme dans les délais attendus, le manquement du prestataire à ses obligations contractuelles, fussent-elles de moyens compte tenu de la marge d’aléa tenant compte du rôle du client dans sa participation au projet, peut être démontré s’il ne justifie pas d’une préparation suffisante de sa proposition ni d’avoir déployé ses meilleurs moyens. Nos avocats en droit de l’informatique vous éclairent.

Une société ayant pour objet le développement d’une application mobiles de co-voiturage conclut avec une entreprise de services numériques un contrat aux fins de réalisation d’une application pour smartphones. selon un process en méthode Agile.

En raison de dysfonctionnements, après plusieurs mises en demeure, le client (qui a pris soin de faire établir des constats d’huissier) souhaite mettre un terme aux relations contractuelles et sollicite une indemnisation. Le prestataire conteste les griefs et met en demeure son cocontractant de régler les factures dues, puis l’assigne en paiement.

Le tribunal de commerce de Nanterre donne pleinement raison au prestataire, condamnant même le client au paiement des sommes restant à facturer ; ce dernier interjette appel.

La cour d’appel va examiner en détail le contrat ainsi que son exécution, notamment les échanges de courriels des parties, pour apprécier le caractère fondé de la résiliation et relève que :

  • le client avait adressé un cahier des charges précis et le prestataire avait établi son devis sur cette base, en incluant un calendrier qui ne peut être qualifié d’estimatif, faute d’indication en ce sens, et alors que l’objectif du client était parfaitement connu ;
  • la livraison était incomplète et défectueuse ;
  • il ne peut être reproché au client qui dénonçait les dysfonctionnements de ne pas avoir adhéré à une proposition de PV de dernières réserves, en l’absence même de procédure de recette décrite dans le contrat ;
  • il n’est pas établi que le client aurait adopté une attitude agressive ou d’obstruction (le recours aux constats d’huissier étant notamment pleinement légitime).

Par conséquent, la résolution du contrat doit être prononcée aux torts exclusifs du prestataire qui se voit condamner au remboursement des sommes versées en pure perte, puisque sans contrepartie utilisable. Le préjudice d’image du client est également établi et il est indemnisé forfaitairement à ce titre.

Notons que la cour exclut l’opposabilité d’une clause limitative de responsabilité dans la mesure où le contrat dans laquelle elle était insérée n’a pas été signé.

Toutefois, la demande indemnitaire personnelle des associés de la société cliente sera rejetée.

Source : Cour d’appel de Poitiers, 1re chambre, 3 octobre 2023 – RG n°22/00104