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Attention aux clauses de pénalité GTR, clauses limitatives de responsabilité ? Non !

27 novembre 2019 | Derriennic Associés|

Cour d’appel de Versailles, 12ème Chambre, Arrêt du 24 octobre 2019, Répertoire général nº 18/07160

Dans un contrat télécom d’accès à internet, les garanties de débit et de temps de rétablissement sont des obligations de résultat et le manquement grave de l’opérateur vidant de sa substance l’obligation essentielle souscrite justifie l’inopposabilité de la clause limitative de responsabilité contractuelle que constitue le plafond de pénalité en cas non-respect.

Une société souscrit auprès d’un opérateur de télécommunications, un contrat de fourniture d’un accès au réseau téléphonique et d’un service de connectivité Internet. Insatisfaite du débit de connexion constaté, le client adresse pas moins de 3 mises en demeure sur une période de plus de 6 mois qui resteront sans effet avant que le dysfonctionnement ne soit traité et clôturé le jour même à la suite d’une correction de configuration.

Le tribunal de commerce de Nanterre saisi par le client à l’effet d’obtenir la réparation de son préjudice va condamner le prestataire qui sollicite l’infirmation du jugement.

La cour d’appel relève qu’aux termes du contrat, le prestataire s’est engagé à fournir sur le site client un accès permanent à Internet « à un débit Ethernet symétrique et garanti de 93Mbps » chiffre qui sera donc retenu et considéré comme un engagement de résultat.

Pour les juges, il se déduit que pendant cette période le prestataire non seulement n’a pas respecté son obligation de résultat de garantir le débit prévu mais encore, et a fortiori, son obligation de « Garanties de qualité de service » aux termes desquelles la garantie de temps de rétablissement (GTR) doit être inférieure ou égale à 4 heures.

S’agissant d’une obligation de résultat, il appartenait au prestataire de rapporter la preuve d’un fait qui pourrait l’exonérer de sa responsabilité pendant cette période ce qu’elle ne fait pas et l’absence de réponse aux sollicitations du client pendant une aussi longue période est injustifiée.

La cour va confirmer le jugement sur le principe de la réparation du préjudice, révisant son quantum à environ 15K€, sous réserve de l’examen de l’applicabilité de la clause de limitation de responsabilité. En effet, le prestataire fait grief au tribunal d’avoir dit inopposable la clause de limitation de responsabilité contractuelle plafonnant l’indemnité à la moitié du prix de l’abonnement mensuel, soit 340€.

La cour rappelle la possibilité d’insérer au contrat des clauses limitant la réparation à laquelle est tenue une partie. En l’espèce, la clause prévoit qu’en cas de non-respect des Garanties de Qualité de Service l’opérateur paiera au Client une pénalité plafonnée et en cas de non-respect de la GTR, les pénalités auxquelles peut prétendre le client limitent à 50% du montant de l’abonnement mensuel l’indemnisation d’une absence de rétablissement du service, cette indemnisation qualifiée de « pénalités » constituant la seule conséquence du non-respect par l’opérateur des garanties de qualité service.

Pour les juges, par le non-respect du débit garanti ainsi que du temps de rétablissement également garanti, l’absence de réponse aux mises en demeure et le délai d’intervention et de résolution de la panne de plus de 6 mois, le prestataire a manqué gravement à ses obligations contractuelles et dans ce contexte « le caractère dérisoire de l’indemnisation vide de sa substance l’obligation essentielle souscrite. », « cette limitation crée un déséquilibre entre les parties dans la relation contractuelle puisque le coût d’une absence ou d’un dysfonctionnement du service, et ce quelle que soit la durée de l’absence ou des dysfonctionnements de service, est si faible pour [l’opérateur] qu’il dénature l’obligation de fournir un service avec débit minimum garanti et un délai de rétablissement également garanti, [le] conduisant à n’intervenir que contrainte et forcée à la suite d’une assignation sans respecter ses propres obligations contractuelles. »

La cour confirmera ainsi le jugement en ce qu’il a considéré que ces clauses devaient être, en l’espèce, réputées inopposables au client.

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