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Un constructeur ne peut agir en garantie avant d’être lui-même assigné aux fins de paiement ou d’exécution de l’obligation en nature

22 mars 2023 | Derriennic Associés|

Depuis un arrêt du 16 janvier 2020 (Cass. 3e Civ, 16 janv. 2020, n° 18-25915), le Cour de cassation considérait :

  • d’une part, que le recours d’un constructeur contre un autre constructeur ou son sous-traitant relevait des dispositions de l’article 2224 de Code civil et, partant, se prescrivait par cinq ans à compter du jour où le premier avait connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer,
  • d’autre part, que tel était le cas d’une assignation en référé-expertise délivrée par le maître d’ouvrage à l’entrepreneur principal, laquelle mettait en cause la responsabilité de ce dernier.

Dans son arrêt du 14 décembre 2022, la Cour de cassation fait le constat que cette règle oblige les constructeurs, dans certains cas, à introduire un recours en garantie contre d’autres intervenants avant même d’avoir été assignés en paiement par le maître d’ouvrage, dans le seul but d’interrompre la prescription. Elle ajoute que cela conduit à la multiplication de ces recours préventifs, ce qui nuit à une bonne administration de la justice.

C’est pourquoi la Cour de cassation modifie sa jurisprudence et estime désormais que l’assignation, si elle n’est pas accompagnée d’une demande de reconnaissance d’un droit, ne serait-ce que par provision, ne peut faire courir la prescription de l’action du constructeur tendant à être garanti de condamnations en nature ou par équivalent ou à obtenir le remboursement de sommes mises à sa charge en vertu de condamnations ultérieures.

En pratique, une assignation en référé-expertise ne constitue donc pas le point du départ du délai de recours entre constructeurs si cette assignation se limite à demander la désignation d’un expert et ne comporte aucune demande de condamnation, ne serait-ce qua partielle. Ce délai ne commence à courir que lorsque le constructeur est assigné aux fins de paiement, y compris à titre de provision, ou d’exécution de l’obligation en nature.

Il faut voir dans cet arrêt la volonté de la Cour de cassation de modifier sa jurisprudence lorsque celle-ci conduit les justiciables à devoir multiplier les procédures. Toutefois, ce que la jurisprudence a fait, la jurisprudence peut le défaire…

Source : Cass. 3e civ., 14 déc. 2022, n° 21-21305