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Jeff Koons de nouveau condamné pour contrefaçon

11 juin 2021 | Derriennic Associés|

Cour d’appel de Paris, Pôle 5 – chambre 1, 23 février 2021, n° 19/09059

La Cour d’appel de Paris confirme la condamnation pour contrefaçon de l’artiste contemporain Jeff Koons, qui avait réalisé une sculpture inspirée d’une photographie publicitaire sans l’accord de l’auteur.

Jeff Koons, artiste se revendiquant du courant de l’art appropriationiste, s’est vu reprocher l’utilisation d’une photographie dont il ne détenait pas les droits.

En 2014, le Centre Pompidou a présenté une exposition rétrospective de Jeff Koons. Une sculpture y était présentée, intitulée Fait d’hiver, représentant une femme et un cochon dans la neige, scène fortement inspirée d’un visuel que la marque Naf-Naf avait utilisé pour une publicité quelques années auparavant. Le photographe auteur de ce visuel et détenteur des droits de propriété intellectuelle a assigné Jeff Koons (entre autres) en contrefaçon.

En première instance, le TGI de Paris avait accueilli favorablement les demandes de l’auteur, jugement contre lequel Jeff Koons a interjeté appel.

Après avoir relevé que l’œuvre première était bien une œuvre originale, la cour s’est attardée sur les arguments invoqués par Jeff Koons :

  • Pour échapper à la qualification de contrefaçon, Jeff Koons mettait tout d’abord en avant le caractère transformatif de l’œuvre Fait d’hiver en arguant de différences significatives.

Cependant, et de manière classique, la contrefaçon s’apprécie au regard des similitudes, et non des différences. La contrefaçon était donc bien constituée.

  • L’artiste se prévalait d’autre part de l’exception de parodie.

Or, pour pouvoir invoquer l’exception de parodie « l’œuvre seconde doit évoquer une œuvre existante », ce qui n’était pas le cas en l’espèce, l’œuvre originale, diffusée en 1985, étant aujourd’hui inconnue ou oublié du public.

Enfin, l’argument principal de l’artiste reposait sur le célèbre arrêt Klasen (Civ. 1re, 15 mai 2015, n° 13-27.391), argument selon lequel une condamnation pour contrefaçon porterait une atteinte disproportionnée à son droit à la liberté d’expression protégé par la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

Cependant, la cour a rejeté cet argument. D’une part, en rappelant que si la CEDH accorde une forte protection des expressions politiques, le message véhiculé en l’espèce par la sculpture ne relevait pas de l’expression politique mais d’une expression artistique, ne bénéficiant pas de la même protection.

D’autre part, la cour a soulevé le fait que l’œuvre première n’est pas connue du grand public. Le public ne pouvait donc pas percevoir le caractère transformatif de l’œuvre de Jeff Koons.

Enfin, la cour a rappelé que Jeff Koons, artiste disposant de moyens financiers, était en mesure et aurait même dû obtenir l’autorisation de l’auteur de l’œuvre. Il est en effet propre au droit d’auteur de permettre la rémunération de l’artiste en contrepartie de l’autorisation d’exploiter son œuvre.