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La représentation d’un torse d’homme sous forme de flacon ne saurait faire l’objet d’un monopole !

23 mai 2023 | Derriennic associés|

Dans une affaire opposant le titulaire des droits sur le flacon de parfum « LE MALE » de Jean-Paul Gaultier à une société commercialisant des flacons de parfum représentant également un tronc masculin sans bras, la Cour d’appel de Lyon confirme le jugement de première instance venant rejeter les actions en contrefaçon de dessins et modèles et contrefaçon de marque.

L’affaire oppose la société Beauté Prestige International, titulaire des droits sur le célèbre flacon de parfum « LE MALE » de Jean-Paul Gaultier, à laquelle sont venus aux droits les sociétés APSA et Noms de codes, aux sociétés Gifi mag et Gifi diffusion commercialisant des flacons de parfum « PURE LOOKS » représentant également un tronc masculin sans bras, musclé, dans les teintes bleutées et avec des rayures.

Considérant que ses droits avaient été bafoués, la société Beauté Prestige International a assigné en contrefaçon de dessins et modèles et de marques les sociétés commercialisant les flacons litigieux, notamment via l’enseigne de produits à bas prix Gifi.

Après avoir été débouté en première instance, le demandeur saisit la Cour d’appel de Lyon qui vient confirmer le jugement de première instance venant rejeter les actions en contrefaçon de dessins et modèles et contrefaçon de marque.

  • Concernant les dessins et modèles, le tribunal avait rejeté les demandes présentées par le demandeur au titre de la contrefaçon de modèles en considérant que l’impression visuelle d’ensemble qui se dégage des flacons n’est pas la même, de sorte que l’observateur averti ne sera pas amené à considérer que les deux flacons litigieux « PURE LOOKS » sont une déclinaison des flacons protégés.

En appel, le demandeur soutient que la contrefaçon est caractérisée dès lors que l’impression d’ensemble est identique, un observateur averti pouvant croire, compte tenu des ressemblances flagrantes, qu’il s’agit d’une déclinaison bon marché du modèle revendiqué, portant ainsi par ailleurs atteinte à son image de marque.

La Cour rappelle les dispositions de l’article L. 513-5 du CPI qui dispose que « La protection conférée par l’enregistrement d’un dessin ou modèle s’étend à tout dessin ou modèle qui ne produit pas sur l’observateur averti une impression visuelle d’ensemble différente », afin de confirmer la position des juges du fond et de rejetter l’action en contrefaçon en raison de l’impression d’ensemble différente : « si les deux flacons présentent un certain nombre de similitudes, celles-ci portent essentiellement sur des éléments secondaires ou tiennent au choix de représenter un corps d’homme qui ne saurait donner prise, en soi, à un monopole ; or, si l’appréciation de la contrefaçon impose de tenir compte des ressemblances, il n’en demeure pas moins que l’impression visuelle d’ensemble reste déterminante, alors que l’abondance et la force des différences peuvent affecter considérablement cette perception ; en l’espèce, les différences constatées donnent aux deux corps représentés des allures distinctes ».

  • Concernant la marque, le Tribunal avait rejeté en première instance la demande en contrefaçon, faute de risque de confusion dans l’esprit du public.

La Cour rappelle les dispositions de l’article L. 713-3 du CPI selon lequel « Sont interdits, sauf autorisation du propriétaire, s’il peut en résulter un risque de confusion dans l’esprit du public : b) l’imitation d’une marque et l’usage d’une marque imitée, pour des produits ou services identiques ou similaires à ceux désignés dans l’enregistrement » et vient, là encore, confirmer la position des juges du fond et rejeter l’action en contrefaçon dans la mesure où « s’il est certain et non discuté que la marque figurative protégée jouit d’une notoriété certaine la faiblesse des similitudes relevées entre les signes exclut, même en présence de produits de nature identique, de retenir l’existence d’un risque de confusion dans la mesure où le consommateur moyen ne saurait être amené en l’espèce à croire que le flacon vendu sous la dénomination « PURE LOOKS », serait une déclinaison, même bon marché, du flacon protégé à titre de marque ».

En conséquence, la Cour retient l’absence de risque de confusion dans l’esprit du public, compte tenu de la faiblesse des similitudes relevées entre les signes concernés.

Source : CA Lyon, 1è civ. 13 mars 2023, n°13/01906