En matière de propriété intellectuelle et plus spécifiquement de droit d’auteur, il est intéressant de présenter ici une notification du bureau américain d’enregistrement des droits d’auteur datée du 21 février 2023 ( United States Copyright Office de Washington DC) à l’encontre d’une autrice d’un comics book, c’est-à-dire d’une bande dessiné. Cette bande dessinée s’appelle Zarya of the Dawn.
Cette autrice, Kristina Kashtanova, avait préalablement fait une demande d’enregistrement de son livre auprès de cette administration qui lui avait été accordée en date du 15 septembre 2022. Elle avait, lors de sa demande initiale, indiqué qu’elle était l’auteur unique du comic book (images, contenu et textes) sans préciser que certaines images avaient été gérées par un outil d’intelligence artificiel dénommé Mindjourney. Cet outil d’assistance propose différentes images de manière aléatoire sur demande, sur la base d’un texte descriptif.
Cependant, le Copyright Office a appris via les réseaux sociaux que la demande d’enregistrement initiale de Madame Kashtanova n’était pas correcte dans la mesure où elle n’avait précisé avoir utilisé Mindjourney.
Le bureau d’enregistrement a alors fait une nouvelle analyse beaucoup plus poussée, que nous vous résumons ci-dessous. Il convient de garder à l’esprit que nous sommes ici en common law et que c’est bien le Copyright Act qui est visé, son article 17.2 U.S.C paragraph 102 (a) et un arrêt fondamental en la matière, l’arrêt Burrow-Giles Lithographic Co. v. Sarony de 1984.
Les points majeurs à retenir sont donc les suivants :
- Pour qu’une œuvre de l’esprit soit considérée comme originale deux conditions sont nécessaires : l’œuvre doit être une création originale et présenter une créativité suffisante.
- L’auteur du livre peut se voir reconnaitre des droits d’auteur et donc une originalité dans ses travaux sur le texte, qui est bien le produit d’un travail d’un auteur personne physique. La sélection et l’arrangement du texte et des images peut donner lieu à protection au titre du droit d’auteur ; ce qui donnera d’ailleurs lieu au nouvel enregistrement accordé par le US Copyright Office.
- Mais, pour ce qui concerne les images rajoutées dans le comic book et issues de l’outil d’IA Mindjourney, ces images ne peuvent pas être reconnues comme étant une œuvre de l’esprit créée par une personne physique, quand bien même Mme Kashtanova aurait modifié ces images grâce à Photoshop avant de les éditer. C’était bien l’outil Midjourney qui avait créé les éléments traditionnels d’autorité de l’image. Midjourney n’a donc pas passé le test de l’arrêt Burrow-Giles à savoir : « the “author” of a copyrighted work is the one “who has actually formed the picture,” the one who acts as “the inventive or master mind.”
Conclusion : A date, aux Etats Unis, des images gérées de manière aléatoire et imprévisible par un outil d’IA ne peuvent pas être reconnues comme ayant été crées par une personne physique qui les aurait ensuite reproduites et modifiées.
