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Vers des agréments obligatoires auprès de l’AMF ?

21 décembre 2022 | Derriennic Associés|

Dans le monde des « PSAN » (Prestataires de Services sur Actifs Numériques tels que définis par la loi PACTE du 22 mai 2019) et alors que, jusqu’à ce jour, deux façons d’exercer légitimement leurs activités coexistent en France (l’enregistrement auprès de l’AMF d’un côté, et l’agrément optionnel de l’autre côté) le Sénateur Hervé Maurey, qui s’est fait connaitre par son rapport sur l’Aménagement numérique des territoires et la loi qui en a découlé de 2012, a présenté le 12 décembre dernier un amendement visant à modifier l’article 54-10-4 du Code monétaire et financier visant à rendre obligatoire en France l’agrément[1].

Rappelons que pour pouvoir acheter ou revendre des cryptos actifs en France, conserver des actifs numériques, exploiter une plateforme de négociation d’actifs numérique ou échanger de tels actifs contre d’autres actifs numériques, l’enregistrement auprès de l’AMF est obligatoire. Cet enregistrement vise à apporter des garanties pour les consommateurs et le marché, en particulier en matière d’honorabilité, de compétence des dirigeants mais aussi et surtout en matière de lutte contre le blanchissement de capitaux et le financement du terrorisme et de gel des avoirs (LCB-FT).

A ce jour, 57 sociétés PSAN sont enregistrées auprès de l’AMF.

L’agrément, quant à lui, nécessite de soumettre à l’AFM un dossier plus complet et détaillé (avoir une assurance responsabilité civile,       exigence de fonds propres ou encore des états financiers règlementaires). Cet agrément, donc toujours optionnel, est sensé apporter des gages de conformité, d’honorabilité et de sécurité plus élevés que l’enregistrement. A date, aucun prestataire PSAN n’a obtenu d’agrément. Les acteurs du marché et en particulier l’association ADAN, souligne les difficultés à la fois opérationnelles (difficulté d’obtenir l’assurance dans ce secteur d’activité) et administratives (manque de moyens de l’AMF) auxquelles seraient confrontés ces acteurs en cas de procédure d’agrément obligatoire.

Au travers de l’amendement proposé, le Sénateur souhaite que l’agrément devienne obligatoire au 1er octobre 2023 au plus tard. Il justifie ce resserrement règlementaire par un alignement sur le règlement européen MiCA et le contexte actuel de crise (exemple de la liquidation de la plateforme FTX ou des retraits en milliards de dollars sur la plateforme Binance).

Le sénateur Maurey considère également que les acteurs de l’écosystème des cryptos actifs, aujourd’hui enregistrés auprès de l’AMF, auraient de grandes difficultés à obtenir l’agrément si celui-ci était obligatoire et la «  future entrée en vigueur du règlement MiCA, et surtout la période transitoire, pourrait être à l’origine d’un « appel d’air » pour les acteurs, qui se presseraient de demander leur enregistrement pour pouvoir bénéficier d’un délai supplémentaire de 18 mois avant de devoir demander un agrément. »

Dans un contexte de fin d’année 2022 très tendu pour les opérateurs du monde des cryptos actifs, il semble effectivement déterminant de ramener de la confiance auprès des consommateurs et investisseurs. Il faudra cependant savoir faire preuve de mesure entre d’un côté une règlementation très contraignante et, de l’autre côté, la volonté affichée de la France et de l’Union Européenne d’aider les champions locaux de la crypto à croitre et se développer.

Il semble donc que cet amendement a de fortes chances d’être adopté prochainement d’abord par le Sénat, pis l’Assemblée Nationale.

Affaire à suivre.


[1] Aperçu de l’amendement (senat.fr)