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L’invention de mission créée par un salarié appartient à son employeur qui est libre d’en disposer

11 mars 2022 | Derriennic Associés|

Cour de cassation, Chambre commerciale, Arrêt nº 7 du 5 janvier 2022, Pourvoi nº 19-22.030

La qualification d’invention de mission emporte, pour la personne morale employeur du salarié qui l’a réalisée, droit au titre de propriété industrielle (brevet) sur cette dernière. L’employeur est ainsi libre d’en disposer et de le céder à un tiers.

 L’arrêt rendu par la Cour de cassation le 5 janvier 2022 est l’occasion de revenir sur les conditions applicables à l’invention de mission. Il s’agit d’une invention réalisée par un salarié dans le cadre de son contrat de travail et, notamment, au titre d’une mission inventive, permanente ou occasionnelle. Dès lors que la création est qualifiée d’invention de mission, l’employeur, et lui seul, est titulaire d’un droit au titre sur ladite invention et ce, dès sa création, dont il pourra faire usage en déposant le brevet. L’inventeur salarié aura le droit d’être cité comme inventeur, sauf s’il s’y oppose.

En l’espèce, un salarié de la société Icare développement avait participé à la réalisation d’un dispositif portable d’alerte, lequel a fait l’objet d’un brevet déposé auprès de l’INPI. Icare développement fait l’objet d’une procédure de liquidation et les actifs de cette société, incluant le brevet susvisé, sont cédés à la société Info Networks Systems (« INS »).

La société INS a ensuite déposé un autre brevet français portant sur un procédé de détection de chute, désignant l’ancien salarié d’Icare Développement comme co-inventeur. La société INS cède ses droits sur ces brevets français à une autre société, la société Télécom Design.

L’ancien salarié, considérant que ce brevet réutilisait les travaux réalisés avec ses moyens personnels, a assigné les sociétés INS et Télécom Design afin de se voir transférer la propriété du brevet litigieux.

L’inventeur avait été débouté de ses demandes par la Cour d’appel, alors que, selon lui « l’acquisition des éléments incorporels de l’actif d’une société, comprenant un brevet et le résultat de travaux effectués dans la continuité de ce brevet par un salarié investi d’une mission inventive qu’elle avait employé, ne confère pas au cessionnaire la qualité d’ayant droit de l’employeur, en sorte que ce cessionnaire, qui a déposé un brevet à partir de ces éléments, n’est pas fondé à opposer au salarié que l’invention, dont celui-ci est l’auteur et revendique la propriété, est une invention de mission lui appartenant »

Pour la Cour, conformément aux articles L. 611-6 et L. 611-7, 1 du Code de la propriété intellectuelle, la qualification d’invention de mission emporte que le droit au brevet sur cette invention appartient au seul employeur, et « Aucune disposition n’empêche celui-ci de céder ce droit à un tiers » ; le salarié n’ayant jamais été détenteur de droit à un titre de propriété industrielle : : »si l’inventeur est un salarié et que l’invention est faite dans le cadre de l’exécution de son contrat de travail comportant une mission inventive qui correspond à ses fonctions effectives, le droit au brevet sur cette invention appartient au seul employeur. »

En conséquence, les sociétés sont fondées à opposer leur droit de propriété sur ces brevets à l’inventeur, qui échoue dans son action en revendication de la propriété des brevets litigieux.