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Point de départ du délai biennal de garantie des vices cachés en cas d’action récursoire contre le fournisseur : la date d’assignation en référé expertise prévaut

20 octobre 2022 | Derriennic Associés|

Par contrat signé en 2004, un M. [X] a confié à une entreprise générale la construction d’un bâtiment.

Pour effectuer les travaux, l’entreprise générale a acquis auprès d’un fournisseur, le 22 octobre 2004, des plaques de fibre ciment (composant la couverture), elles-mêmes acquises auprès d’un fabriquant.

En 2014, se plaignant de désordres liés aux plaques de fibres ciment, le maître d’ouvrage assigne l’entreprise générale, en référé expertise. En 2016, une fois le rapport d’expertise obtenu, le maître d’ouvrage assigne l’entreprise générale aux fins d’obtenir réparation de son préjudice.

L’entreprise générale a appelé en garantie le fournisseur et le fabricant dans le cadre du référé expertise puis dans le cadre de l’action au fond.

Pour échapper à l’engagement de sa responsabilité, le fournisseur a formé un pourvoi en cassation soutenant que, à la date de sa mise en cause (le 22 décembre 2014), le délai de prescription de deux ans en garantie des vices cachés était largement écoulé (les matériaux ayant été achetés le 22 octobre 2004).

La Cour de cassation rappelle tout d’abord que l’entrepreneur engage sa responsabilité contractuelle décennale à compter de la réception des travaux, et que les vices affectant les matériaux ou les éléments d’équipement mis en œuvre par un entrepreneur ne constituent pas une cause d’exonération de la responsabilité encourue à l’égard du maître d’ouvrage.

Elle rappelle ensuite que l’action fondée sur la garantie des vices cachés doit être introduite dans un délai de deux ans à compter de la découverte, par l’acquéreur, du vice (il s’agit d’un point de départ glissant).

Rappelant une jurisprudence établie, la Haute juridiction rejette le moyen soulevé par le fournisseur au motif que « l’entrepreneur ne pouvant pas agir contre le vendeur et le fabriquant avant d’avoir été lui-même assigné par le maître de l’ouvrage, le point de départ du délai qui lui est imparti est constitué par la date de sa propre assignation ».

En d’autres termes, en matière d’action récursoire fondée sur la garantie des vices cachés, la « découverte du vice », constitutive du point de départ du délai biennal, s’entend du jour ou l’entrepreneur est assigné par le maître d’ouvrage.

A cette occasion, la Cour de cassation est venue préciser que ce qu’il faut entendre par « date d’assignation ».

En l’espèce, l’entrepreneur a été assigné à deux reprises par le maitre d’ouvrage : une première fois en référé en 2014, et une seconde fois au fond en 2016. La Cour de cassation estime que le délai de deux ans court à compter du jour de la première assignation, soit celle en référé expertise.

Il en résulte que, en cas d’assignation, même en référé expertise, il est important d’effectuer très rapidement l’action récursoire et les mises en cause des fournisseurs et fabricants, même en l’absence de tout dépôt du rapport d’expertise judiciaire.

Source : Civ. 3e, 16 février 2022, n° 20-19.047