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Régime social de l’indemnité transactionnelle : nouvelle illustration des conditions d’exonération

15 avril 2022 | Derriennic Associés|

 

Par un arrêt rendu le 17 février 2022, la Cour de cassation se prononce à nouveau sur le régime social de l’indemnité transactionnelle et confirme sa jurisprudence selon laquelle une telle indemnité peut être exonérée à condition qu’elle présente un caractère indemnitaire.

En l’espèce, deux salariés avaient saisi le conseil de prud’hommes d’une demande de résiliation judiciaire de leurs contrats de travail, reprochant notamment à leur employeur un non-respect des temps de repos de leurs forfaits jours et des règles relatives aux congés payés.

Avant que le juge ne se prononce sur le bienfondé de leurs demandes, les salariés ont conclu un accord transactionnel selon lequel, en contrepartie du versement d’une indemnité transactionnelle, ils ont renoncé :

  • d’une part, à la demande de résiliation judiciaire de leurs contrats de travail et à leurs conséquences,
  • d’autre part, à réclamer à la société tous chefs de demande, « avantage en nature ou en espèce de quelque sorte que ce soit et notamment des indemnités et paiements divers consécutifs à l’exécution ou à l’éventuelle rupture des relations de la société (rappels de salaire, avantages individuels, primes diverses, heures supplémentaires, jours RTT, indemnités de préavis et de licenciement, congés-payés, avantage en nature, frais professionnels, droits à DIF, indemnités de toute nature, sans que cette liste soit exhaustive) ».

Plus généralement, chacun des salariés se déclarait entièrement rempli de ses droits nés à l’occasion de sa collaboration avec la société.

A la suite d’un contrôle, l’Urssaf a notifié à la société un redressement résultant de la réintégration dans l’assiette de cotisations sociales de ces indemnités transactionnelles. Pour l’Urssaf, ces sommes ne pouvaient être exonérées dès lors notamment que :

  • Elles comprenaient des éléments de rémunération versés en contrepartie ou à l’occasion du travail,
  • L’employeur ne caractérisait pas la réalité des préjudices subis par les salariés et ne justifiait donc pas l’exonération des sommes.

La société, qui estimait au contraire que ces indemnités transactionnelles présentant un caractère indemnitaire, elles bénéficiaient d’une exonération intégrale, a contesté ce redressement.

Tant la cour d’appel que la Cour de cassation approuvent le raisonnement de l’employeur et annulent en totalité le redressement opéré.

Au visa de l’article L242-1 du code de la sécurité sociale, la Cour de cassation affirme que « pour le calcul des cotisations des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales, sont considérées comme rémunérations toutes les sommes versées aux travailleurs en contrepartie ou à l’occasion du travail, à moins que l’employeur ne rapporte la preuve qu’elles concourent, pour tout ou partie de leur montant, à l’indemnisation d’un préjudice. »

En l’espèce, peu important que la transaction vise expressément une renonciation des salariés à réclamer le paiement notamment de sommes ayant une nature salariale, dès lors que les juges du fond ont fait ressortir la commune intention des parties d’indemniser les salariés des conséquences du manquement de l’employeur à ses obligations en matière de santé et de sécurité au travail, ils ont souverainement pu décider que la société rapportait la preuve que l’indemnité ne constituait pas un élément de rémunération mais compensait un préjudice.

Dans ces conditions, les indemnités transactionnelles n’entraient pas dans l’assiette des cotisations sociales.

Par cet arrêt, la Cour de cassation confirme ainsi sa jurisprudence de 2018, qui a donc également vocation à s’appliquer aux indemnités transactionnelles versées en dehors d’une rupture du contrat de travail. Elle doit en revanche inviter à la plus grande vigilance les rédacteurs de transaction quant à leur intention et à la définition des différents postes de préjudice que l’indemnité a vocation à réparer.

 

Source : Cass. Civ. 2ème, 17 févr. 2022, n°20-19.516