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Résiliation : respectez la philosophie du contrat ou attention aux conséquences !

09 octobre 2023 | Derriennic associés|

Dans le cadre d’une obligation de moyens du prestataire, résilier le contrat pour faute impose au client de pouvoir justifier ses griefs et rapporter la preuve de la gravité des manquements contractuels commis. A défaut la rupture sera jugée infondée et le prestataire pourra prétendre à une indemnisation, le client n’ayant pas respecté la « philosophie du contrat » et la collaboration prévue. Nos avocats en droit de l’informatique vous guident avec expertise.

Une société qui propose des services de conseil sur le management et la formation aux entreprises contractualise avec une société spécialisée en systèmes et logiciels informatiques, prévoyant que le prestataire s’engage, à titre de simple obligation de moyens, de réaliser la mise en place de la stratégie commerciale et d’accompagnement dans le développement commercial et de la commercialisation de la solution logicielle du client.

Quelque mois après, le client résilie, arguant en détail de difficultés d’exécution et du manque de performance du prestataire dans sa mission, sans amélioration après les demandes du client, et considérant que les graves manquements contractuels mettaient en péril sa société et la fragilisait à l’égard de ses clients. Le prestataire conteste les griefs, sollicite le paiement des sommes restant dues, puis assigne son client devant le tribunal de commerce. Ce dernier va lui donner partiellement raison en condamnant le client à payer un solde de facture ainsi que des dommages et intérêts au titre de la rupture abusive sans préavis. Le prestataire insatisfait des montants alloués interjette appel.

La cour va examiner en détail le contrat et son exécution pour apprécier le caractère fondé de la résiliation. Si la clause répondait aux conditions prévues par l’article 1225 du code civil, il appartenant au client de rapporter la preuve de la gravité des manquements contractuels commis par la société prestataire pour justifier la résiliation anticipée et unilatérale du contrat. Après avoir rappelé la nature de l’obligation (de moyens et non de résultat), elle confirme le jugement, écartant l’ensemble des griefs insuffisamment caractérisés et démontrés.

La résolution du contrat ne reposant sur aucun motif grave et étant infondée, la cour va ensuite déterminer l’indemnisation du préjudice du prestataire et c’est sur ce point que l’arrêt est riche d’enseignement.

En effet, au-delà de la « lettre du contrat » qui n’imposait pas de mise en demeure préalable avant la résiliation, un article prévoyait la collaboration étroite et de bonne foi, ainsi qu’un engagement à ce titre à se concerter en vue de mettre en place une solution adaptée pour résoudre la difficulté.

Les juges vont relever que « Plutôt que d’opter pour une solution concertée dans le respect de la philosophie du contrat, la société [cliente] a opté, (…) pour une résiliation brutale, sans préavis, et ne reposant sur aucun motif grave », privant aussitôt le prestataire de tous les moyens de connexion nécessaires à la poursuite de l’exécution du contrat.

Ainsi, au-delà du solde de facturation :

  • Compte tenu de la désorganisation de l’entreprise engendrée par cette résiliation brutale, de l’atteinte portée à l’image du prestataire, de la nécessité de trouver, dans l’urgence d’autres partenaires, les juges vont confirmer la réparation du préjudice subi pour rupture abusive du contrat,
  • Y ajoutant, la cour considère que le prestataire était également fondé à réclamer une somme au titre du gain manqué et de la rémunération qu’elle aurait dû percevoir jusqu’au terme du contrat.

Source : Cour d’appel d’Aix-en-Provence, Chambre 3-3, Arrêt du 27 juillet 2023, RG nº 19/18984

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